Escrime médiévale

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Blondin
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Re: Escrime médiévale

Message par Blondin »

Deimoss a écrit : ven. juin 04, 2021 2:18 pm Ouais enfin vaincre ton adversaire en AMHE avec une mine antipersonnelle c'est un peu limite je trouve :P
PJ 1 : Je me jette sur le vampire stellaire avec ma Claymore et je la lui fais détonner dans la tronche ! :smoke

PJ 2, 3 et 4 : Trop badass ! 8O 8O

MJ : Ok, pas besoin de test, ça passe. Ton adversaire et toi subissez 12d10 points de dégâts, sur lesquels on rejette tout résultat inférieur à 8. T'as encore un point de Destin, j'espère :twisted:
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Cryoban
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Re: Escrime médiévale

Message par Cryoban »

Blondin a écrit : ven. juin 04, 2021 3:20 pm PJ 1 : Je me jette sur le vampire stellaire avec ma Claymore et je la lui fais détonner dans la tronche ! :smoke
PJ 2, 3 et 4 : Trop badass ! 8O 8O

MJ : Ok, pas besoin de test, ça passe. Ton adversaire et toi subissez 12d10 points de dégâts, sur lesquels on rejette tout résultat inférieur à 8. T'as encore un point de Destin, j'espère :twisted:

C'est vraiment très Old School Renaissance ton exemple, aujourd'hui ça se passe comme ça:

PJ 1 : Je me jette sur le vampire stellaire avec ma Claymore et je la lui fais détonner dans la tronche ! :smoke
PJ 2, 3 et 4 : Trop badass ! 8O 8O

MJ : Ok, pas besoin de test, ça passe. Ton adversaire et toi subissez 12d10 points de dégâts, sur lesquels on rejette tout résultat inférieur à 8. T'as encore un point de Destin, j'espère

PJ1: Ben non, pas besoin! cette action est au max de la jauge de Coolitude, donc je ne prend aucun dégâts réels. Je ressors de la fumée de l'explosion en marchant, le visage noirci puis je regarde la caméra en faisant un clin d'oeil avant de m'allumer une cigarette
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Blondin
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Re: Escrime médiévale

Message par Blondin »

M'ouais. C'est pas tellement que je sois old school, c'est surtout que ma suspension d'incrédulité volontaire a un seuil très, très bas :neutral:. Après, c'est vrai que je suis moyennement narrativo-compatible... :runaway
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Deimoss
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Re: Escrime médiévale

Message par Deimoss »

Ca sera surtout fonction du ton de la campagne/du scénario là. Si c'est quelque chose d'héroïque et décomplexé, le second exemple est parfait, mais bon on joue des héros badass. On se fait quoi? L'enfer du devoir ou GI Joe?
Un peu comme avec un jeu med fan où on va se cogner violemment sur la trogne avec de bonnes lames d'acier magique qui devraient tuer les persos en une passe ou deux. :mrgreen:

D'ailleurs vu qu'on parlait de noms impropres... Mon cerveau a fait plop 8)7
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KamiSeiTo
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Re: Escrime médiévale

Message par KamiSeiTo »

Ça devienne sérieusement HS là quand même. ^^'
C'était juste une blague sur la polysémie de "claymore", mais si vous voulez continuer cette discussion, elle a à la limite plus sa place dans le fil dont celui-ci est issu. n_n
Proposer un jeu qui soit au service d’une façon de jouer spécifique et, surtout sans tomber dans le piège de ne pas en permettre d’autre, néanmoins tout inféoder à cette dernière.
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Re: Escrime médiévale

Message par Terisonen »

Excellent fil.
Bon, en fait: les jeux à niveau ça craint, les jeux à secret ça craint aussi.
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cdang
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Re: Escrime médiévale

Message par cdang »

Bon, sinon, l'actualité nous le rappelle : on néglige trop souvent la paire de baffes dans l'arsenal des AMHE :mrgreen:
--
Vous êtes mort
pseudo
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Re: Escrime médiévale

Message par pseudo »

:mrgreen:
Et l'importance du cri de guerre.
Apparently you can take the boy out of the dungeon, but you can't take the dungeon out of the boy
(knights of the dinner table #73)
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Lotin
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Re: Escrime médiévale

Message par Lotin »

Je vais revenir rapidement sur deux ou trois points ici et là, je vais citer des bouts de réponses des uns et des autres pour essayer d’apporter un point de vue plus archéo (certains points le méritent vraiment) ainsi que peut-être quelques réponses. Je vais commencer par le plus important (et je m’excuse pas avance mais je vais être hors sujet sur probablement l’intégralité de mon post car il visera beaucoup de choses mais certainement pas le Moyen Âge) :

Parler d'escrime médiévale, c'est aussi se heurter au fait que le MA, c'est vaste géographiquement et temporellement et que ce qui est vrai à un endroit/temps donné ne l'est pas 500 ans et/ou 2000km plus loin... […]
Ce point est particulièrement applicable aux « romains » souvent convoqués dans cette discussion. Les romains depuis la fondation de leur Cité jusqu’à l’effondrement de leur empire, ce n’est pas loin de 12 siècles quand même. Autant dire que le système technique militaire et toutes ses composantes ont particulièrement évolué au cours des temps. Depuis les premières phalanges romaines à la grecque en mode hoplite du 7e/6e avant n. è aux légions dioclétiennes constituées de 3000 hommes maximum, du chemin en a été parcouru et de nombreux allers-retours dans tout ce qui touche au domaine militaire auront été faits. Il faut aussi ajouter à cela le problème des sources écrites dont nous disposons qui sont très partiales et orientées.

Rapidement au sujet des blessures.
Casser un os, à l'époque, c'était pas bien grave, on avait l'hiver pour se remettre.
Ou pas… artère sectionnée par un os fracturé, organes internes défoncés, infection interne, accès à des soins suffisants pour ne pas être handicapé (pas évident en campagne militaire lointaine), etc… Là aussi, de quelle période on parle exactement.

Au premier coup, tu es sonné ou mort. Ou sourd.
Et pourtant pas de coupure dans ce cas-là. Un bon coup au crâne sans coupure est mortel.

Comme je disais plus haut, un os, ça se répare. Une entaille, on en meurt.
Non, on en meurt aussi. Il y a une sorte de mythe à croire que parce que la blessure est invisible elle ne tue pas. Et si elle ne tue pas, elle incapacite dans un premier temps et la victime peut croiser les doigts pour ne pas être achevé.
L’exemple de la bataille de Tollense (âge du Bronze, en Allemagne vers -1200) montre clairement la létalité de casse-têtes en bois (même pas en métal, du bois…). Petit exemple :
Spoiler:
Image

Généralités sur les armes.
Les premières armes étaient en bronze qui est un alliage de cuivre.
La pierre est certainement un matériaux moins noble que le métal dans l’esprit de beaucoup mais les premières armes restent en pierre, en roches siliceuses (silex par exemple) pour la plupart mais que. C’est sans compter les armes en matière périssable (qui ne se conservent donc pas comme le bois par exemple) et dont on peut déduire la présence par le type de blessure. La radio d’Otzi montre une armature de flèche logée au niveau d’une de ses omoplates. Ce n’est qu’un cas parmi tant d’autres de la fin du Néolithique ou nombre de sépultures ont livré des restes osseux portent encore fichées des têtes de flèches en silex (Castellet à Fontvieille, le dolmen de Font Rial à Saint-Rome-de-Tarn, les Châtelliers du Vieil-Auzay, l’hypogée de Roaix, etc.). Et avant le bronze, on a, logiquement, des armes en cuivre (la grotte du Pas-de-Joulié à Trèves a livré une colonne vertébrale avec un couteau en cuivre planté dans l’une de vertèbres, entre autres exemples).

Au sujet des équipements militaires des Romains.

Le bouclier est là pour protéger.
Pas que et loin de là, c’est une arme hybride et pas que défensive (dans sa catégorisation typologique).
Par exemple, la description du duel entre Titus Manlius Torquatus et un gaulois faite par Tite-Live l’illustre parfaitement : « Ceint d’un écu de fantassin et d’une épée d’Espagne, il prit position en face du Gaulois (...) Ils prirent position comme je viens de le dire : le Gaulois à sa manière, le bouclier en avant, chantant; Manlius, ayant plus de confiance dans le courage que dans l’habileté frappa ce bouclier de son bouclier et ébranla l’équilibre du Gaulois. Tandis que le Gaulois cherche à retrouver sa station, Manlius frappe à nouveau le bouclier de son bouclier et fit perdre de nouveau à l’homme sa position ; de cette façon il réussit à passer sous l’épée du Gaulois et plongea l’arme espagnole dans sa poitrine, puis aussitôt de la même secousse, il pénètre l’épaule droite et ne se retira pas avant d’avoir renversé le Gaulois afin que celui-ci ne pût prendre élan pour frapper. Lorsqu’il l’eut renversé, il coupa la tête, enleva le collier et le met tout sanglant à son cou. » D’ailleurs Titus tiendra son surnom Torquata de cet exploit, le collier en question est un torque celte. Quant à « l’épée espagnole » c’est une traduction littérale un peu foireuse du glaive utilisé par les romains à partir du 3e siècle avant notre ère (la date exacte reste un peu floue : avant ou pendant la 2e guerre punique), le gladius hispaniensis.
Pour en revenir au bouclier, la présence de l’umbo est liée à deux choses, dévier les projectiles (fonction défensive) et asséner de violents coups lestés (en plus des propriétés techniques bien entendu). Comme la présence sur certains modèles d’orles métalliques probablement utilisés aussi pour casser la bouche de son voisin histoire d’entamer de bonnes relations (en plus d’assurer la solidité du dispositif, empêcher le pourrissement du bois avec le bouclier posé au sol et mieux résister à la taille), geste documenté par ailleurs. Une technique de combat de gladiateur d’ailleurs fait tenir le bouclier à l’horizontal pour maintenir à distance son adversaire et on sait que pendant certains temps, des gladiateurs servaient d’instructeurs martiaux aux légionnaires…
On sait aussi qu’à plusieurs reprises des soldats romains se sont fait prendre sans bouclier. César relate dans son récit de la guerre civile (De Bello civili) que des soldats pris au dépourvu pouvaient s’enrouler le bras de leur vêtement pour se constituer une protection rapide de fortune n’ayant pas le temps d’équiper leur bouclier (ils enroulaient leur cape).

Après, les épées ont toujours été des armes secondaires et/ou civiles
Du tout (ne jamais dire « toujours »). A chaque arme sa situation. L’épée est tellement secondaire que c’est cette arme qui va incarner la représentation idéalisée du guerrier dans de multiples cultures, à en devenir une incarnation physique du pouvoir. Pour nos Celtes par exemple, c’est l’épée et son fourreau qui dominent, et de très loin (dans un rapport du simple au triple), les dépôts guerriers votifs dans les sanctuaires. Notamment pour la période La Tène C1/ C2 (-250/-160) avant un effondrement de ce type de pratique au cours de LT D1 (-130/-80-70) et pour les régions nucléaires du second âge du Fer.


Oui. Pour moi, le gladius est déjà une arme de dernier recours, au contact. L'arme principale du légionnaire reste le pilum.
Pas vraiment, le pilum pour les légions tardo-républicaines et du Haut Empire c’est une arme de jet avant tout (il est bien sûr utilisable au corps-à-corps mais ce n’est pas sa destination première ni forcément le plus pratique selon les situations). Parfaitement intégré dans la tactique utilisé par les légions ou le lancer s’effectuait avant le contact (quitte à ce que la vitesse de marche soit réduite pour laisser le temps de dégainer notamment). Il sert peu sur la durée d’un combat comparé au reste de la panoplie du légionnaire. Au moins les Gaulois avaient un propulseur en cuir pour démultiplier la force de projection du trait.

En fait, d'après ce que j'ai lu les légionnaires utilisés très peu leurs pilums au corps à corps, il était trop fragile pour cela.
Tout à fait. En fait depuis la réforme marienne, l’installation d’une cheville en bois et utilisation d’un fer doux pour que le pilum se torde et soit un poids supplémentaire fiché dans le bouclier de l’ennemi et gênant ses gestes par l’encombrement généré.
Plusieurs textes parlent de l’utilisation des armes par les romains. Dans les Annales de Tacite : « Ils devaient seulement garder leurs rangs serrés, lancer leurs pilums, puis, avec l’épée et la bosse du bouclier, tuer et massacrer sans relâche. »
D’après César et Tite-live, les romains ne chargent pas à pied, ils arrivent en maîtrisant le rythme pour ne pas perdre leur souffle et leur force (quitte à ralentir) après avoir soumis l’adversaire à une pluie de pilum (le légionnaire du Haut Empire en possède deux) (tactique pratiquée par les celtes aussi avec des javelots), ils n’accélèrent que sur les derniers mètres pour un gros push. Durant certaines périodes, le gros désavantage de leur équipement est qu’ils portent l’arme à droite pour ne pas gêner le bouclier et doivent donc dégainer avec leur main droite sur le même coté, ce n’est possible qu’avec la longueur de lame courte des gladius. Des fois, les romains n’ont pas le temps de jeter leur pilum.
Par ailleurs, les pilums ont de multiples formes, lestés ou non, avec juste la pointe en métal, tout le corps jusqu’à la hampe, un poids ajouté pour les modèles utilisés pendant les sièges, etc. La typologie de ces armes est considérable. Pour finir, le pilum finit par disparaître durant le bas empire remplacé par le spiculum/verutum et les plumbatae (de très grosses fléchettes de lancer lestées).

Une des difficultés de l'armée romaine face aux celtes ou germains, c'est justement qu'ils sont arrivés avec leurs petites armes en bronze, face à des gaillards qui portaient des mailles (lorica hamata) et avaient des épées longues en acier. D'ailleurs, après la conquête des gaules, l'armée romaine a adopté aussi cet armement.
Cette remarque me surprend beaucoup, pendant la guerre des Gaules, ça fait déjà un moment que les romains utilisent des armes en fer quand même… Certaines parties pouvaient être en bronze comme la poignée ou le fourreau mais pas la lame. L’adoption d’équipement se fait par petites touches, souvent sur le long terme et lié à des changements dans les tactiques militaires (ce qui est une constante de l’histoire militaire romaine)… La lorica hamata est adoptée bien plus tôt que la Guerre de Gaules qui n’est pas le premier contact de la romanité avec le monde celte. N’oublions pas que plusieurs expéditions de celtes gaulois ont ravagé Rome (Vae Victis) en plus d'une longue tradition de mercenariat ayant emmené les Celtes jusqu'en Asie mineure, en Galatie. Celle des Sénons de Brennus reste la plus célèbre mais il y en a eu d’autres. Sur le côté gaillard, je vais y revenir un peu plus bas. La proximité des lames celtes et romaines pendant la guerre des gaules est telle qu’il est très délicat de déterminer lors d’une fouille les propriétaires des armes mises au jour. Un fait remarquable d’ailleurs à ce sujet est la faible quantité d’équipements militaires mis au jour pour ces contextes tardo-républicains et impériaux en regard de ce qui a été produit par l’état romain pour fournir à ses troupes leur équipement militaire (on parle quand même de plusieurs centaines de milliers d’hommes sur la durée et donc autant d’équipements). A titre d’exemple tout à fait personnel et qui ne vaut pas pour généralité, lors d’une fouille que j’ai dirigée en 2019 du côté de Toulon, parmi les sépultures de la nécropole, nous avons trouvé dans l’une des tombes (IV/Ve) deux anneaux d’une probable lorica hamata. Deux anneaux nous sont parvenus en 16 siècles pour un objet qui en comprenait entre 20 et 30000.

Il y a aussi d'autres soldats dont on parle peu, avec une arme peu connue, la funda, mais qui ont fait des ravageurs sur tous les champs de bataille : les frondeurs !
Les auxiliaires des Baléares sont de vrais spécialistes de la fronde et celle-ci fait même partie du paquetage de base du légionnaire à certaines périodes. Une munition de fronde a une forme d’olive, elle est lestée et elle peut faire de terribles dégâts et si on en a plus dans sa besace, suffit de se pencher pour ramasser des cailloux.
Dernière modification par Lotin le mer. juin 09, 2021 11:50 pm, modifié 1 fois.
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Re: Escrime médiévale

Message par Lotin »

De la stratégie et tactique romaine.
On le voit très bien dans la première scène de Gladiator qui est la seule crédible pour les combats d'armées.
Non, pas vraiment, du tout, à part flatter la rétine elle est aussi irréaliste que le reste du film sur le plan historique (ce qui n’en fait pas un mauvais film pour autant, juste qu’il ne faut pas le mobiliser comme un bon exemple historicisant). La tactique romaine pour la période considérée est toute autre : tenir la ligne notamment. La cavalerie romaine (qui n’est pas une bonne cavalerie) ne chargeait certainement pas en forêt (pour les romains comme les celtes, « l’infanterie était la reine des batailles ») au risque de tuer ses propres montures. La cavalerie légionnaire romaine sera supprimée en -107 par la réforme attribuée à Marius, les troupes montées efficaces ne seront que des auxiliaires (gaulois, espagnols, numides (ces derniers étaient reconnus comme parmi les meilleurs cavaliers qui soient), Germains) (il faudra attendre la période des Sévères pour une refonte de la cavalerie romaine) pareil pour les archers (crétois et ituriens notamment) et l’infanterie légère, (les vélites qui ne sont plus attestés quasiment après Marius). Ce dernier point est important car il est l’un des principaux atouts de la tactique romaine : choisir son terrain (et là il est choisi car ils combattent au pied d’un castrum, mal mais ils l’ont choisi). Pour en revenir à la cavalerie romaine, celle-ci aura pendant un long moment un rôle annexe, de soutien, harcèlement, exploration, etc. César en était même quasiment dépourvu, lors de sa rencontre avec Arioviste, qui exigea qu’elle se tint entre cavaliers, il écrit ne pas faire confiance aux cavaliers gaulois (signalant par là-même l’absence d’une cavalerie romaine). Il confia alors les montures gauloises aux légionnaires de la Xe en qui il avait pleinement confiance et qui y gagne par ailleurs son surnom d’equistris. Quelques erreurs grossières du film : Fratres au lieu de Cives. La portée des armes (arc et de siège) complètement fumée. Le positionnement des cohortes dos à leur talus se coupant de toute retraite. La position des archers. Le Feu des enfers et le feu des armes tirées. Le mélange de position offensive et défensive (genre tortue testudo et pilum). Tenir des lignes pour au final assister à une foultitude de duels. Bataille inspirée et très librement adaptée de la bataille d’Idistaviso.
C’est lors des 50 dernières années de la République que fut constituée une armée permanente mais comprenant une partie très importante d’auxiliaires. Pourquoi tant d’auxiliaires ? Car l’armée romaine connaissait ses limites, elle n’était pas intrinsèquement la meilleure (son histoire le prouve et elle le savait) mais elle a toujours su combler ses lacunes, se relever, se fortifier, etc. L’une des forces de la puissance militaire romaine c’est le Génie militaire et civil (tout ce qu’ils sont capables de construire) et Domitius Corbulon le dit très bien au 1er siècle : « Il faut vaincre l’ennemi par le hoyau, c’est-à-dire par les ouvrages ? ». Un légionnaire en campagne ne trimballe pas que ses armes mais aussi des outils qu’il savait manier car c’est aussi un artisan. Une armée romaine en déplacement c’est un truc colossal, en plus des militaires, il y a tout un train de spécialistes, des matériaux, des vivres, des bêtes qui transitent aussi. Les légions romaines sont capables à titre d’exemple de construire un pont sur le Rhin pour faire traverser les troupes en -55, parce qu’elles le peuvent et que traverser en bateau est indigne du Romain. Le tout en une dizaine de jours (avec toute la réserve que l’on peut avoir vis-à-vis du texte de César).

La première ligne a le bouclier et elle est changée tous les quelques minutes par le gars derrière qui les tient à la ceinture et les tire en arrière au signal. Elle est toujours fraiche. On le voit très bien dans la première scène de Gladiator qui est la seule crédible pour les combats d'armées. La deuxième est acroupie et est chargée de couper les tendons à l'arrière du genou de la première ligne adversaire, en passant entre les boucliers. Sans pouvoir tenir debout, difficile de se battre ! Et la troisième ligne, ce sont les lanciers qui empalent les gars en face, tranquillement, sans être au contact ni inquiétés.
C’est pas tout à fait ce qui ressort de l’examen des textes et des représentations et de l’actualité de la recherche. La 3e ligne est aussi là pour exécuter les fuyards, elle intervient dans le combat quand c’est assez désespéré.

Des armes et stratégies/tactiques celtes.
De mémoire mon prof d'AMHE nous disait que sur de la reconstitution gallo-romaine il avait compris pourquoi dans la Guerre des Gaule César traite les nobles gaulois de lâches qui passent leur temps à se cacher derrière leurs lanciers. En donnant un coup sur un bouclier ou une armure romaine, les épées gauloises se pliaient en deux. Donc ils étaient obligés de se replier pour tordre la lame et la remettre droite pour retourner au charbon. A moitié à poil en plus, c'est plus sport.
De mémoire aussi, mais il me faudrait vérifier dans plusieurs traductions du De Bello Gallico, il ne me semble pas avoir lu de tel passage. L’épée celte qui se plie au combat, c’est un mythe datant de Polybe et issu d’une malencontreuse observation. La lame est souple comme dit à plusieurs reprises plus haut mais les lames celtes ne plient pas et ne nécessitent pas d’être redressées. C’est l’une des plus grandes ambiguïtés de la perception des mondes proto/antiques. Les Celtes sont connus et réputés par leurs contemporains pour être des maîtres dans l’art de la forge comme en témoigne de nombreuses innovations techniques et équipements divers (équipement que les romains ne se priveront pas d’adopter par ailleurs…) et ça ne pose pas de souci dans ce cadre de penser que leurs épées se pliaient en deux à l’impact… Les seules épées pliées sont celles déposées dans des sépultures ou dans des sanctuaires (certaines sont mêmes pliées avec leur fourreau), pratique d’ailleurs plus très en vogue durant l’invasion césarienne. J’en ai fouillé quelques-unes en contexte de la fin du premier âge du Fer (Hallstatt) dans le Lot dans des sépultures en tumulus.

En outre j'ai aussi lu quelque part que l'instruction romaine aux troupes en ce qui concerne l'usage du gladius encourageait très vivement à n'utiliser que les attaques d'estocs contre les adversaires plus fort physiquement que le romain moyen. Ca concernait en particulier les Celtes et les Germains qui étaient peu protégés rendant l'attaque d'estoc plus facile à réaliser, afin de les tuer rapidement sans avoir à rentrer dans un duel qui leur était défavorable.
Là aussi on en revient pas mal de cette idée véhiculée du celte nu au champ de bataille, si cela a du exister à la marge (cela est décrit pour les volques tectosages mais bien avant la guerre de Gaules), le dénuement si cher à Polybe/Tite-Live/Diodore semble plutôt correspondre à une vieille vision du monde celte là aussi. A plusieurs reprises César décrit des quantités astronomiques d’équipements militaires pris aux gaulois. Mais il est plus que probable que tous n’avaient pas de lourdes protections à la romaine, du moins pas de lorica hamata car c’est un équipement qui coute cher et à l’inverse des romains c’est le soldat qui fournit son propre équipement alors que pour les romains c’est le consul qui lève la légion qui en finance l’équipement (et qui se standardise donc fortement courant du 1er siècle avant notre ère). Par contre, il y a fort à parier que les nobles gaulois étaient assez bien équipés justement en défensif (notamment en lorica hamata).
L’estoc, en plus d’être adapté à une formation romaine plus serrée ne permettant pas la taille, a l’avantage de moins exposer le bras. C’est aussi une question d’économie d’énergie, car un tel coup en consomme moins.

Mais j'imagine qu'un romain qui se faisait attraper tout seul par un celte ca devait vraiment pas être la fête pour lui du coup.
Après on parle quand même d’engagés volontaires très entrainés, des professionnels de l’arme. C’est un héritage césarien qui est entré dans la légende (César relate que les Germains se moquaient de la plus petite taille des Romains), le petit brun contre le grand sauvage, n’empêche qu’à la fin, ce sont les petits qui ont gagné. Surtout que parmi les troupes alliées, auxiliaires, mercenaires, il y en a un paquet de celtes et de germains aussi. La différence de taille est en partie avérée par les données anthropométriques mais elle est probablement à relativiser car compensée par beaucoup d’autres choses dont l’entrainement. Pour rappel, les celtes (hors unité de mercenaires) ne s’entrainaient pas à la guerre, pas comme les Romains à partir des réformes de Marius, on considère que c’est la chasse qui entraine le geste et le muscle. La différence probable qui joue en certains contextes est la mobilité et rapidité extrême des troupes celtes. Ils avaient tout ce qu’il fallait pour manier leurs épées longues disposant d’un rayon d’action supérieur à celui du légionnaire et de son gladius. D’où l’importance pour les romains de combattre en formation (souvent moins serrée que ce qu’on voit au cinéma). Pompée au sujet de ses troupes à Pharsale en prend bien soin de peur de ses propres glaives.
Durant le Haut Empire, le recrutement des légionnaires imposé une taille minimum de 1,68 m et 1,77 m pour être de la première cohorte ou cavalerie. Recrutement qui favorisera d’ailleurs celui des gens de campagne et de montagne jugés moins mous que ceux des villes et déjà habitués à de rudes conditions de vie. Qui plus est, depuis Auguste, les chefs préfèrent les batailles en rase campagne car il met en valeur le courage individuel. Il est loin le temps de la bataille de Cannes.

Même si certaines armes ont eu une utilisation très restreinte, d'autre non, et j'ai du mal a croire que les guerriers de l'époque ne s'en soit pas remis au choix le plus sûr pour leur vie. Amha, la lance, a probablement des désavantages que d'autre armes ont comblé.
Ben ne serait-ce que la place nécessaire pour la manipuler. Tu peux la manipuler au sein d’un groupe resserré mais tu en vas en limiter très fortement l’usage (il suffit de voir l’exemple du port de l’arme à droite imposé par la gêne du bouclier pour se rendre compte de ces problèmes d’espace, d’ailleurs les auteurs latins eux-mêmes ne sont pas d’accord sur l’espace nécessaire à un combattant et les mesures varient (mais elles témoignent peut-être de variations chronologiques d’ailleurs). Le milieu aussi va jouer pour beaucoup, manipuler une lance quand tu es pris en embuscade dans les bois ou en contexte très défavorable (coucou Teutoburg, Trasimène ou l’histoire d’une branlée en deux temps) n’est probablement pas le plus opti.

De la puissance romaine.
Ce qui a fait gagner l'armée romaine, c'est son organisation, face à des hordes désorganisées. En bataille rangée, elle était tout simplement imbattable.
Vrai pour partie. Mais elle n’est pas imbattable, loin de là, elle-même ne se considérait pas comme imbattable mais elle savait très bien pallier ses défauts. Elle a de nombreux points forts que la simple force dont je parle pour partie plus haut : castramétation, ravitaillement, situation politique dans laquelle elle intervient, préparation du terrain, etc. ainsi qu’une très forte capacité à adopter ce qui marche chez les autres comme par exemple le casque gaulois et la cote de maille, le glaive espagnol (gladius hispaniensis) qui deviendra le gladius romain, etc. La bataille n’est que l’une des étapes de la guerre chez les Romains. On le voit bien d’ailleurs pour la Guerre des Gaules qui dure de -58 à -52 (-51/-50 pour les dernières révoltes secondaires). L’essentiel des combats a lieu dans les premiers mois mais une fois débarrassé des dangereux Helvètes, Germains d’Arioviste et des Belges, César est relativement libre de faire ce qu’il veut jusqu’en -52 avec la résistance de Vercingétorix et ses épigones (par exemple Luctérios et ses cadurques et ses alliés nitiobroges et compagnie).
Le désordre des celtes est réel mais pas permanent ni systématique, c’est aussi lié à une autre façon de combattre. Pendant leur déplacement, ils sont décrits comme braillards, chantants, pillant tout ce qu’ils croisent (ennemis et amis). Le front totalement désuni qu’ils devaient présenter dans l’imaginaire romain joue pour beaucoup et à raison aussi. En revanche, ils connaissaient des formations similaires comme deux types de phalanges (en tirailleurs et à la macédonienne épaule contre épaule et qui pourrait être à l’origine de la tortue romaine d’ailleurs), le cuneus (en pointe vers l’ennemi), etc. Ils maitrisaient la poliorcétique, l’exemple du murus gallicus est suffisamment parlant. Certains maitrisaient la bataille navale comme au large de Quiberon où les bateaux gaulois à hauts bords ne purent être abordés par les romains. Sans compter les innovations techniques dont ils ont fait preuve au cours de leur histoire (le système d’attache des armes et d’autres…). Ne pas oublier non plus que nombre de nobles gaulois ont fréquenté les tentes des gradés romains (contubernalis) dont peut-être Vercingétorix ainsi étaient-ils formés à la stratégie/tactique romaine.

Pour faire très court, les soldats romains ne sont pas les plus performants de leur temps (long) mais ils appartiennent à un système entier dédié à l’activité guerrière qui a permis à l’armée romaine de nombreux exploits et de marquer la légende des siècles à venir. Son histoire est marquée par de nombreuses crises (il y a un paquet de défaites à leur actif), mais ces crises ont été surmontées pour la plupart engendrant une évolution des pratiques guerrières : adoption de nouvelles armes, changement dans la constitution et le recrutement des troupes, puissance démographiques permettant de lever des troupes considérables, etc. L’image qu’on a du légionnaire romain et de ce qui lui est attaché (dont le gaulois/celte) est souvent issu d’un agglomérat de plusieurs caractéristiques qu’il a affichées à travers le temps (12 siècles). Il n’en reste pas moins pour le Haut-Empire, qu’il s’agit d’une véritable machine de guerre qui aura étendu l’Empire comme jamais sous Auguste.
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Kandjar
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Re: Escrime médiévale

Message par Kandjar »

Et quand le professeur Lotin parle, on l'écoute bouche bée et on dit merci !
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Udo Femi
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Re: Escrime médiévale

Message par Udo Femi »

Et on prie pour que la DGSI ne passe pas par là...
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Cryoban
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Re: Escrime médiévale

Message par Cryoban »

Merci @Lotin pour ces précisions instructives.
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Re: Escrime médiévale

Message par cdang »

Lotin a écrit : mer. juin 09, 2021 10:23 pm
Les premières armes étaient en bronze qui est un alliage de cuivre.
La pierre
Oui, bien sûr. Je voulais dire « le premier métal utilisé pour les armes ».
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Re: Escrime médiévale

Message par Fabien_Lyraud »

les troupes montées efficaces ne seront que des auxiliaires (gaulois, espagnols, numides (ces derniers étaient reconnus comme parmi les meilleurs cavaliers qui soient), Germains)
Et aussi des Scythes. Attesté par les fouilles à Poitiers l'existence d'une caserne de mercenaires scythes. Je ne sais pas de quelle époque ça date non plus. Mais les Scythes étaient parmi les meilleurs cavaliers de l'époque. Pas aussi bon que les Parthes, mais ils devaient être juste après.
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