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Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : dim. mars 30, 2014 11:29 am
par le Zakhan Noir
oui c'est prévu. Ca ne concerne pas tout le CR, mais comme il est inutile de lire le reste si on ne lit pas cette partie-là, je songe à mettre un gros avertissement en gras au début, genre ne lisez pas si vous n'avez pas lu ou vu tel épisode. Je verrai bien...

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : jeu. avr. 03, 2014 12:34 am
par le Zakhan Noir
OK, voici le CR de l'escapade de mon perso, Volken Blacksword, aux Jumeaux.

ALORS COMME CA N'A PAS DE SENS DE LIRE LE CR SANS LA PARTIE A SPOILER, JE VAIS TOUT METTRE SOUS SPOILER. NE LISEZ PAS SI VOUS N'AVEZ PAS LU LE TOME 9 LES NOCES POURPRES OU VU LA FIN DE LA SAISON 3.


Juste pour info, le Meujeu a surkiffé sa race d'interpréter Walder Frey. C'était visible, audible, ça faisait plaisir...

Comme toujours, désolé pour le pavé, c'est mon pêché mignon, mais la proportion de dialogues étant plus élevée, le texte est plus aéré je pense...
Spoiler:
CHAPITRE 30 : Tanathos écrase Eros
— Pour mon père, pour Jorren, crèèèèèèvve, chien abject, crrèèèèèèève ! Maintenant je sais pourquoi notre bannière est une épée qui transperce un loup garou ! Crrèèèèèève ! »
Chaque coup de dague transperce des chairs déjà sanguinolentes, déjà tuméfiées, déjà inertes. Je ne vois plus rien, je suis tout entier concentré dans cette lame, je suis l’acier qui s’abat, encore et encore, je ne suis que cris, violence, et frénésie, bousculant les ombres indécises qui osent me disputer mon morceau de proie…
— Crrrrèèèèèèève ! ».
C’est la douleur qui me tire progressivement de mon état second. De l’épaule au poignet, tout mon bras me lance. A part la tête de mon ennemi qui est tranchée net par Walder le Noir, le reste du corps n’est que bouillie sanglante. Mécaniquement, je sors la fiole que m’a confiée Illirya, et je n’ai aucun mal à récupérer du sang de cette engeance, sous le regard circonspect des Frey qui en ont pourtant vu d’autres. Le liquide pourpre qui emplit les parois de verre semble ranimer mes souvenirs.

Il y a plus d’un mois que j’ai quitté Deathwatch, juste après la victoire éclatante de mon cousin sur Rickard Ryswell. J’étais heureux qu’il ait pu libérer sa rage, transformer sa tristesse abyssale en colère implacable. La disparition de ces deux verrues ne pouvait nous être que bénéfique. Mais j’ai toujours ce sentiment que quelque chose, ou quelqu’un nous a échappés, cette désagréable impression qu’un ennemi intérieur se délecte des drames qui nous frappent. Lady Lyanna pensait à Andre Snow, qui peut être suspecté vu son statut d’héritier, moi je me méfie toujours de Harsnow, un de nos bannerets, proche de feu mon oncle…
Mais tout cela appartient à mon cousin, c’est sa tâche, son fardeau. Moi, le destin m’appelle plus au Sud, aux Jumeaux, où le message sibyllin de mon grand père m’autorise un espoir des plus fous. Je ne sais ce qu’il manigance, mais il a décidé de se retourner contre les Stark et je veux y jouer un rôle.
J’embarque avec moi quelques gardes, des chevaux, et deux personnes que je laisserai à Seaguard. Un marchand pour continuer à ouvrir des comptoirs, et un … assistant, pour étendre mon… autre réseau, pour le compte d’Edrick. Officiellement, je me rends aux Jumeaux à l’invitation de mon grand père. Inutile de révéler trop de détails si ce n’est pas nécessaire. Nous naviguerons pendant une semaine sur une galère fer-née prise sur notre butin de guerre, sans bannière. Il faut aller vite, et je ne veux pas prendre le risque d’attirer les Poiscailles en battant pavillon Blacksword. Nous serons un peu à l’étroit et dormirons à la dure, mais qu’importe, les oreillers douillets, ce sera une fois la vengeance accomplie.
La première nuit, je m’effondre sur ma paillasse après une journée marquée par une mer démontée et un tangage auquel je ne me ferai jamais je crois. Les yeux clos, je tente d’oublier les ricanements des marins qui perdent leur solde aux jeux de dés, la houle et le vent qui sévissent derrière ces planches cloutées.
Curieusement, je ne ressens pas le froid et l’humidité, je suis comme blotti contre un corps bien chaud, et je frissonne alors qu’une main me caresse les cheveux, en susurrant : « Volken… je suis là pour toi… tout va bien… » Hein ? Quoi ? une main, une voix ? Je… me réveille et constate que je suis plus ou moins enlacé avec une Illirya plus flamboyante que jamais. Un rêve ? non, mon mouvement brusque me fait cogner contre la coque et la douleur est bien réelle. J’ai envoyé valdinguer deux trois ustensiles et j’ai dû crier car des marins se sont arrêtés de jeter leurs dés et me regardent fixement. Pas un regard, pas un commentaire vers l’apparition qui me sourit toujours –
« Volken, que se passse-t-il ? Pourquoi me fuis-tu ? C’est moi , Illirya !
— Non, c’est imposs… tu n’es pas là, ce n’est pas toi, je…
— Mais voyons, Volken, tu sais ce que je peux faire…. Tu vogues vers ton destin, je dois être là pour toi, mon chéri.
— NNON ! QUE VEUX-TU ? TU N’ES PAS ICI CAR PERSONNE NE TE VOIT… TU VEUX ME HANTER, ME RENDRE FOU ? NE TE METS PAS EN TRAVERS DE MA VENGEANCE ! »

Evidemment cette esclandre alimente les rumeurs gênées et discrètes des marins qui tournent leur index sur leur tempe en me désignant et chuchotent quand je passe près d’eux. Illirya disparait et revient à son gré. Je ne sais quelle sorcellerie elle utilise, mais je sais à quel point les faveurs de son dieu de flammes peuvent être cruelles. Il est peu de choses qu’elle ne puisse accomplir, provoquer la crise cardiaque de mon oncle ou transformer mon cousin en machine de guerre n’étant pas les moindres, mais à chaque fois elle doit en payer le prix. Quel sera celui-ci ? Projeter son âme ainsi sur de longues distances et aussi longtemps, cela doit l’épuiser, la blesser…
Je finis par prendre des précautions et discute le plus discrètement possible avec elle. Ce n’est pas simple dans un espace aussi réduit, et je passe donc une semaine agitée, au sommeil incertain. Illirya tente de m’apaiser avec des paroles réconfortantes, pas question de stopper mon entreprise, bien au contraire elle se propose de m’apporter son aide par-delà les distances et les flammes. (Elle prétend être ici et à Deathwatch en même temps, veillant sur notre fils). J’ai beau lui répéter que j’ai besoin de calme, de concentration, de vide autour de moi pour venir à bout de mes ennemis, elle n’en a cure. Je peux devenir blessant, lui dire en boucle jusqu’à la fin des temps que je n’éprouve pas de sentiment pour elle, ça ne change rien au sourire contrit qu’elle me lance et à sa croyance marquée au fer rouge : un jour son dieu m’ouvrira les paupières sur notre destinées commune. Elle semble prête à attendre, érigeant sa patience en acte de foi. Bien sûr, si elle entrevoit un moyen d’accélérer les choses, elle ne s’en privera pas.
Nous accostons enfin au port de Salvemer, où l’administration portuaire s’empresse de calculer les taxes juteuses qu’elles ponctionnera sur notre navire. En tant que représentant des Blacksword (statut vérifié sur les lettres que je possède) je suis convié au château des Mallister, vassaux des Tully.
Dans l’après-midi, je supervise l’installation de Chor Jormund notre marchand et de Ryvas, l’homme qui devra multiplier ses yeux et ses oreilles dans la ville.
Le souper est cordial, mais pas des plus chaleureux : les Mallister, via les Tully, sont encore des alliés du jeune Loup et il est connu que notre famille a brisé ses liens avec les Stark. Et puis il serait déplacé de ripailler grassement quand la population est marquée par les affres de la guerre, des privations…
Si les dieux existent, ils savent que nous n’avons pas été épargnés par les malheurs dans les Barrowlands, mais au moins nos terres n’ont eu à subir que quelques raids fer-nés. Ici, les places fortes, les villages, les champs portent les stigmates des massacres, viols, récoltes brûlées… On est loin des étendards qui claquent au vent et des charges héroïques, le plastron pimpant !
Le patriarche, Jason, nous abandonne rapidement, il doit partir le lendemain recruter des hommes parmi les tribus qui vivent dans les marais. Il sera accompagné d’un petit détachement mené par la mère de Lady Lyanna, Maege Mormont. Quel soulagement, cela fera déjà une ourse de moins à extirper du champ de bataille. Reste sa sœur…
Son fils Patrek prend le relais et m’explique la situation. Depuis la défection des Karstark, le jeune Loup tourne en rond, englué dans les Conflans, privé de l’accès au Nord à cause du verrou de Moat Cailin, incapable d’engager un siège d’envergure avec ses forces réduites. Tywin Lannister le rongera lentement, comme un os avarié. Son seul espoir : recruter l’armée Frey et contre attaquer à l’Ouest. Il a donc prévu de marier son oncle Edmure Tully à l’une des innombrables filles du Tardif. Il est justement en route pour célébrer ces noces et se demande à juste titre si je fais de même. Je donne une réponse évasive, toujours en lien avec la convocation de mon grand père. Le vin qui coule dans nos gobelets ne doit pas altérer mon jugement, moins les Mallister en sauront sur mes intentions, mieux ce sera.
J’estime ne m’en être pas trop mal tiré d’ailleurs, si on prend en compte le fait qu’Illirya, toujours invisible pour les autres, passait son temps à me déconcentrer, passant des mots doux aux menaces soyeuses avec une candeur qui n’a d’égale que sa cruauté. J’ai dit non, c’est non, je ne deviendrai pas fou !!! Si elle est soi-disant vraiment parmi nous, elle n’a qu’à se montrer à tous, pas seulement à moi. Chiche ?
Et d’ailleurs, pour la faire enrager, je la plante sur place et quitte le dîner en compagnie d’une soubrette locale lui palpant fermement les fesses pendant que nous avançons dans les couloirs. Une fois dans ma chambre, si Illirya continue à m’espionner, elle en prendra pour son grade ! J’entre d’un pas décidé, et…. Je freine des quatre fers! ELLE est déjà là, étendue sur mon lit, un sourire mutin et aguicheur.
« Ooh Volken, te voilà enfin ? Je t’attendais… Et euh, tu as amené une nouvelle amie ? Si Lady Lyanna savait cela…
(la servante devient blême, se détache immédiatement et part à reculons en marmonnant des excuses auprès d’Illirya et en me décochant un regard venimeux)
Pris au dépourvu, je referme violemment la porte. Ok, je ne sais pas si je parle à l’originale, à son fantôme, je n’ai aucune idée de l’étendue de ses pouvoirs, mais j’explose et utilise sa langue maternelle :
« Arretez cela, Illirya, tout de suite ! Vous pouvez apparaitre, disparaitre, vous téléporter, cela ne changera rien ! J’ai un très beau souvenir de notre rencontre à Braavos, je suis fier du fils que vous m’avez offert, je suis votre éternel obligé pour m’avoir sauvé la vie contre Arken, je suis conscient des sacrifices et des risques consentis pour ,mmm… éliminer l’Immortel…
— Moins fort, Volken, vous savez bien que ça doit rester un secret absolu ! Quel est le « mais » qui va suivre ?
— MAIS je suis amoureux fou de Lady Lyanna. Vos sortilèges, prophéties, dieux rouges, bleus ou jaunes, n’y changeront rien. Je la chéris depuis trop longtemps, son visage est imprimé dans mon cœur pour toujours. Désolé d’être aussi direct, mais vous méritez la vérité, pas de faux espoirs. Il n’y a que deux choses qui dictent ma vie aujourd’hui : venger mon père et reconquérir son cœur. Sauver sa sœur effacera j’espère ma promesse non tenue. Je la veux elle et aucune autre, fusse-t-elle belle, envoutante, fusse-t-elle-même la mère de mon fils. Ma colère passagère m’ a poussé vers vous, vers ce parfum envoutant du passé, et vous étiez cette douce chose fragile que je pouvais me glorifier de protéger. Mais vous n’avez plus besoin de moi aujourd’hui. Ferrego est reconnu, il est pupille de Deathwatch. Edrick vous fait confiance, le mestre Drake est un de vos amis d’enfance, votre position est solide parmi nous. Je continuerai à m’assurer que vous ne courez aucun danger et pourfendrai ceux qui s’en prendraient à vous ou à mon fils. Vous faites partie de la famille Illirya, mais je n’éprouve pas de passion pour vous. Rien de comparable avec…
— … avec la petite servante que vous venez de séduire? Ca contredit un peu votre beau discours Volken.
— ………….. ? Pff argh non ça c’était juste pour vous faire enrager, je ne serais pas allé jus… oh et puis allez aux sept enfers, vous ne pouvez pas comprendre.

Drapé dans ma fierté, je passe une nuit inconfortable sur le tapis pendant que la prêtresse de R’hllor soupire dans le grand lit à baldaquins. La nuit porte certainement conseil car ce n’est qu’au réveil que j’assimile enfin ce qu’implique la scène de la veille : je ne suis plus le seul à voir Illirya ! Elle est donc vraiment à mes côtés !
Cela se confirme dans la cour où nous harnachons les chevaux avec les gardes qui me suivent encore vers les Jumeaux. Ils se jettent mutuellement des regards éberlués alors qu’elle enfourche gracieusement une magnifique jument blanche sortie de nulle part. Je bredouille rapidement une excuse moisie sur le fait qu’elle a pris la mer la veille et devait me rejoindre incognito pour semer le trouble chez d’éventuels pirates fer-nés. Ils sont vraiment naïfs s’ils y croient, et Illirya joue gros dans cette histoire. Quand ces clampins rentreront à Deathwatch, ils répandront sûrement des rumeurs à base de sorcellerie démoniaque…
Le voyage ne durera que deux jours et devrait se dérouler sans encombre. Patrek Mallister nous a bien mis en garde contre les bandits, pillards, charognards de guerre, mais si je commence à redouter quelques malandrins, je n’irai pas loin ! Il a également insisté sur une bande plus organisée, plus nombreuse, à la réputation grandissante, la Fraternité sans Bannière, qui s’en prend volontiers aux nobles et aux rançons qui flottent au dessus de leur tête. Cela semble plus sérieux, mais au besoin je ferai des miracles avec ma lance ! Tant que j’ai du bon tabac dans ma tabatière, rien ne peut m’atteindre !
Tout se déroule comme prévu, un voyage morne et sans périls, une nuit tranquille à l’Auberge des deux rivières. La laideur de la guerre que nous devinions déjà près de la côté s’exhibe sans pudeur à l’intérieur des terres. En chemin et à l’auberge, les pauvres hères, réfugiés, soldats brisés, déserteurs plus ou moins discrets complètent ce tableau sinistre. Nous entendons parler à nouveau de cette Fraternité sans bannière, en termes plus élogieux cette fois. Cette petite armée semble prendre soin des gueux, des miséreux et traquer les criminels de guerre.
En chemin, la pluie et la boue nous ralentissent, nous fatiguent. Nous ressemblons bientôt à des golems de crotte juchés sur nos chevaux fourbus. Tous, sauf… Illirya, fraiche, propre sur elle, aux cheveux à peine mouillés par les averses féroces. Mais comment fait-elle ?
Nous parvenons enfin en vue des Jumeaux, ces deux tours majestueuses qui encadrent un pont du même acabit. Nul moyen de traverser ailleurs la turbulente Verfurque, pas pour une armée du moins. Les plaines aux alentours sont vides, nous sommes donc arrivés à temps (ou bien trop tard ?), ce qu’Illirya s’empresse de souligner, pour bien montrer l’inutilité de ma colère à son encontre avant le duel judiciaire de mon cousin. J’en profite pour explorer un peu les collines, j’aimerais trouver une grotte isolée, un point de chute discret pour évacuer et cacher quelqu’un facilement. Je ne trouve pas mon bonheur mais repère tout de même un bosquet reculé près d’une cascade qui pourrait convenir…

La gorge un peu nouée, je conduis notre petit groupe aux portes des Jumeaux. Après une rapide vérification de mon identité, je suis introduit dans la grande salle où trône le vieux, le très vieux, l’indéracinable et indécrottable Walder Frey. Pour le coup, l’Immortel, ce devrait être lui…

Son regard plein de malice et de morve semble nous scruter, nous déshabiller… surtout Illirya. Que ce soit feint ou sincère, il met un certain temps à reconnaitre qui je peux bien être et quel lien j’ai avec lui. Après avoir congédié quelques gardes, et proféré quelques remarques peu subtiles sur Illirya et mon goût en matière de femmes, il m’encourage à révéler le but de ma présence.

« Mais vous le savez bien Seigneur ! Je vous l’ai écrit ! Je suis venu vous demander de ne pas honorer de votre hospitalité ce chien de Robb Stark qui vient mendier votre armée après vous avoir trahi, après avoir craché sur vo… notre famille en délaissant votre fille pour une souillon Ouestrelin… Ce chef misérable incapable de retenir son armée et qui ose traiter les hommes d’honneur qui l’entouraient comme de vulgaires criminels. Il a pendu mon père, Seigneur, sans même lui accorder un regard. Je n’aurai pas de repos avant de voir le corps de ce fils de pute livré aux corbeaux ! »

Un long silence s’ensuit, Walder Frey cherchant l’approbation de ses lieutenants (dont son mestre) qui finissent par lui accorder d’un hochement de tête.
« Oh oh que de fougue juvénile ! Heureusement certains ont la tête mieux remplie et ont déjà prévu quelques misères pour le Jeune Loup, qui n’a effectivement rien compris au monde et à la façon dont il tourne. Il va payer sa trahison. Toutes ses trahisons.
— Vous ne pourriez plus me combler, Seigneur. Quand il viendra dresser son camp devant vos murs, vous n’aurez qu’à donner l’ordre, et j’irai lui planter ma lance dans la gorge, peu importe les obstacles. Je…
— HA HA HA AHA AHA AHA HA HAHA HA ! »
Progressivement suivi par celui des suiveurs, le rire grinçant, grêleux de Walder Frey résonne dans la salle. Mêlé de toux, il prend un certain temps pour se calmer, le temps qu’il me faut pour ravaler cet affront et rester de marbre.
« Et après on s’étonne de voir que tous les matamores de Westeros meurent dans la fleur de l’âge. Ce n’est pas ainsi qu’on dure, qu’on survit, qu’on résiste, qu’on reste intact ! Je les enterrerai tous, toi y compris, si tu t’obstines à raisonner comme un taureau enragé ! Suis-moi !
Il m’emmène dans un salon privé avec son mestre et étale un plan des lieux :
« Dans un mois (un mois ! la vache, je suis en avance), le Jeune Loup sera reçu chez moi, nous célébrerons ces fameuses noces, nous partagerons le pain et le sel, nous festoierons, et quand ils seront tous bien saouls et somnolents, quand les musiciens finiront de jouer, ils saisiront leurs véritables instruments pour le bouquet final… (Il pointe différents emplacements sur le plan) Arbalètes, hallebardes, poignards, portes verrouillées de l’extérieur. Nul n’en réchappera. Nous nous occuperons également de ses troupes stationnées devant nos murs, ils ne verront rien venir.
» Et oui, je sais, c’est contraire aux principes, aux commandements divins, mais je m’en fous ! Les dieux aussi crèveront avant moi ! L’avait qu’à réfléchir à deux fois ce merdeux avant de fourrer sa queue dans sa catin à moitié paysanne ! »
J’accuse un peu le coup. C’est tellement énorme… Je comprends mieux les visions d’Illirya, ces bannières, ces alcôves, ces arbalètes… Elle me fixe d’ailleurs du regard comme pour me signifier : « tu vois, je ne t’avais pas menti ». Ce sera un véritable massacre, pas très honorable. Oh, et alors, j’ai toujours clamé que ce déchet ne méritait pas une mort digne de son rang, il est temps d’assumer. Je participerai, bien évidemment ! Seulement, il faut aussi que je sauve Dacey Mormont. J’évoque maladroitement le sujet de la présence des Ourses aux côtés du jeune Loup.
« Ah ! Il est vrai que les Blacksword sont liés aux Mormont par mariage ! Bah, Maege est partie dans les marais, je crois, elle n’assistera pas aux noces. Rassuré ?
— Il reste sa fille, Seigneur, Dacey Mormont.
— Peuh, ah oui, je l’avais oubliée. Faut dire qu’elle est moche comme une truie. Tant pis pour elle, nous ne ferons pas d’exception !
— Je…. Ne pourrait-on…
— Quoi ! Ne me dites pas que tu veux lui sauver la vie ? Tu as un autre objectif que la mort du jeune Loup ?
— Euh non, je ne pense qu’à ça, je vous assure. »
Et merde, pour une fois, ma voix chavire, et j’ai du mal à le regarder dans les yeux. Devant un vieux singe comme Walder Frey (et son mestre qui n’a pas l’air d’être né de la dernière pluie), autant me balader avec le mot menteur peint en rouge sur le front. Il frappe violemment la table et envoie valdinguer un plateau de bronze
— Tu me mens sous mon toit, tu oses ?

— Je… désolé, oui, je l’avoue, j’aimerais que Dacey Mormont survive. Seule elle ne sera pas une menace pour vous. Elle n’est pas responsable de la trahison du Stark, et ne devrait pas payer pour ses crimes. Cela ne change rien à ma détermination seigneur ! Je ferai tout pour que votre plan réussisse, je pense juste être capable de mener ces deux missions de front.

— Non, non, NON ! Trop risqué ! Je ne vais pas mettre en péril ce plan mûri depuis des mois pour tes états d’âmes passagers ! Tu te feras une raison, Volken. Je prends deux décisions, et elles sont irrévocables. Tu participeras aux noces, et vengeras ton père. Tu as un mois pour bien te préparer. Je vais t’adjoindre deux hommes de ma garde personnelle. Ils seront là pour s’assurer que tout se passe bien. S’ils me rapportent le moindre début d’indice que tu es en train de conspirer pour avertir qui que ce soit, Mormont ou pas, dans l’entourage du Stark, tu seras mis aux fers et toute l’affaire se fera sans toi ! Bien sûr, le simple fait de tromper la vigilance de tes nouveaux amis aboutira à la même sanction.

— Je… très bien.

— Parfait. Ah, et une dernière chose. Si tu te lasses de ta grognasse orientale, envoie-là dans mes appartements, je lui trouverai bon usage ha hin a hhin ha hin ! »


Les jours s’écoulent à toute allure. Walder le Noir me prend en charge pour préciser mon rôle. Etant peu doué une arbalète à la main j’obtiens de me glisser parmi les gardes qui seront dans la salle. Je garderai l’une des portes. Rien n’est laissé au hasard, et je partage la vie des autres trouffions pour en comprendre les habitudes, la démarche guindée, les tics de langage. J’ai quand même droit à des séances d’entrainements personnalisées avec « le Black » qui se révèle être un bourrin de première. Jouant tout sur son physique massif et la violence de ses coups, il a manqué à plusieurs reprises de me briser deux ou trois côtes, mais j’ai pu aussi exploiter quelques failles dans ses postures et lui prouver que je rivalise sans problème côté technique.
Illirya continue de me tourmenter sans forcément s’en rendre compte. Plus d’une fois, elle m’attire sur le lit et prend une pose évocatrice. Il est vrai que sa chevelure blonde sur sa peau hâlée n’est pas des plus repoussantes. Et que dire de ses seins chauds qui appellent tant de promesses. Mais, plus rompu qu’elle aux techniques de séduction, je parviens tout de même à résister. Pour Lyanna. Pour ne pas me disperser avant la date fatidique.
Je constate avec dépit que la garde d’honneur de Walder Frey est très efficace. Ils se relaient quand il le faut et ne me laissent JAMAIS seul en dehors de ma chambre ou des latrines (limite…). Idem pour mes gardes courtauds qui ne servent décidément à rien. Que faire ? Comment prévenir Dacey Mormont de quitter l’armée nordiste et de ne pas venir se jeter dans la gueule du… hum, l’expression consacrée m’arrache un sourire vu la situation.
Illirya m’offre une solution. Etant simultanément ici et à Deathwatch (creepy…), elle va persuader lady Lyanna d’envoyer un message auprès de sa sœur, qui soit suffisamment alarmant mais qui ne dévoile rien du piège en lui-même évidemment. Nous avons encore le temps pour cette tentative. C’est notre avant dernière chance de la sauver.
Un beau matin, l’armée Stark arrive enfin par le sud. Comme par enchantement, je suis consigné jour et nuit dans mes quartiers, pendant les deux jours qui suivent, jusqu’à la soirée des noces.
Illirya, qui peut se rendre invisible, parcourt le camp de l’ennemi. D’un commun accord, elle ne parlera à personne, ne révèlera rien. Non seulement cela pourrait compromettre ma vengeance, mais de toute façon, qui croirait une braavienne sortie de nulle part, entourée d’une aura de soufre et de sorcellerie ? Elle peut toutefois m’apprendre ce que je craignais : l’inflexible Dacey Mormont n’a pas abandonné son suzerain pour un message aussi vague que « rejoins-moi, c’est une question de vie ou de mort, signé Lyanna ».
Très bien, je passerai donc au plan B. Celui-ci est assez simple en théorie. Quand les armes parleront, je me précipiterai vers elle, et la ferai s’évanouir grâce à mon gant et la substance anesthésiante que j’ai pris soin de récolter auprès de l’empoisonneur de Blazetower (un type ramené par Solmyr lors de notre enquête sur l’assassinat d’Astreya pour faire un faux témoignage si besoin était. Besoin ne fut pas, mais il a gardé son utilité). Une fois à terre, plus rien ne s’interposera entre moi et Robb Stark, entre lui et sa damnation.
Il devrait être aisé ensuite d’emporter le corps de Dacey Mormont (officiellement pour le remettre à sa sœur), m’isoler dans la clairière repérée aux alentours il y a un mois, lui expliquer du mieux possible la situation et fuir avec elle à Salvemer, puis à Deathwatch.
Il y a un hic : inconsciente ne signifie pas décédée, et pour partir tranquille, il faut que tous la croient vraiment morte. La honte colore légèrement mes joues quand je réclame, encore, l’aide d’Illirya. Fasciné par ses pouvoirs grandissants, je lui demande si elle peut donner à Dacey l’apparence d’un cadavre quand elle tombera au sol, disons pour quelques heures. Elle me l’accorde, à une condition : que je recueille pour elle le sang du Roi qui a perdu le Nord… Je n’en suis plus à une bizarrerie près, j’accepte sans négocier.
L’attente interminable arrive à son terme. Je dois me contrôler pour ne pas trembler d’excitation, engoncé dans mon uniforme Frey. Je suis posté près de la porte sud-est, pas très loin de la rangée où se situe Dacey Mormont. Bien sûr, c’est dur de ne pas se ruer d’emblée sur le jeune Loup qui parade à portée de ma lance, mais patience, patience. Je me donne du courage, je pense à mon père, si joyeux, rayonnant, le conquérant qu’il était l’épée à la main, ou une fleur à la boutonnière en fonction de ses cibles… Je me rappelle son audace, sa gloire, l’amour qu’il me portait… Ce soir, enfin, il connaitra le vrai repos.
L’assemblée boit plus que de raison (Dacey moins que les autres, ça ne m’arrange pas) Pendant qu’Edmure se fait emporter par une marée de filles, Roslyn, son épouse, se fait tripoter par toute l’assemblée mâle. Cela fait un écho sinistre à la cérémonie de mariage à Deathwatch. Là-bas, seule la mariée avait péri. Ici, elle seule risque de survivre…
Je… non, ce n’est pas le moment de faiblir !
D’ailleurs l’orchestre s’apprête à terminer les pluies de Castamere. Walder Frey lève la main et prononce quelques paroles que je n’entends déjà plus.


Tchac ! Les premiers carreaux fusent vers les convives ! Robb Stark en prend un dans le bras, ô joie ! Je me précipite vers Dacey Mormont, mais avant que je ne puisse l’atteindre, elle s’en prend un aussi, en plein dans l’estomac ! Nnnnnoooooon !
Un type, je ne sais qui, s’interpose entre nous et m’attaque avec un barreau de chaise… je l’embroche sans ménagement. Avec difficulté dans ce chaos général, je me glisse derrière Dacey Mormont et entreprends de plaquer mon gant chloroformé sur ses narines. Mais j’ai perdu du temps, et la bougresse ne se laisse pas faire. Elle ne peut pas me faire bien mal, désarmée comme elle est, mais elle gigote dans tous les sens, retardant l’échéance, et agrandissant l’horrible plaie autour du carreau. J’ai envie de crier, de lui hurler d’arrêter, que je veux la sauver, mais de toute façon elle n’entendrait rien, la panique qui se lit dans ses yeux est celle des bêtes qui se savent condamnées. Elle faiblit enfin, je peux appliquer plus fermement le produit… elle glisse, inerte.
Mes oreilles sont sur le point d’exploser dans ce vacarme infernal. Les cris de douleur se multiplient, le fracas des tables fracturées, les chopes lourdes qui tombent, les arbalètes qui claquent, les victimes qui tambourinent vainement sur les portes scellées, les plaintes, les supplications, le sifflement des lames dégainées, le rire de mon grand père. Quand Catelyn Stark s’effondre, la gorge ensanglantée, le cadavre d’Aegon Frey entre ses mains, c’est l’hallali. Robb Stark, prostré au sol, ne bouge presque plus. Je me rue en hurlant, précédé, suivi par d’autres…. Ma vision se brouille, je ne vois que du rouge.
- Crrèèèèèèèèvee ! (cf début du CR)

La fiole est pleine. Quelle est la situation ? C’est une vision d’apocalypse. Les corps sont enchevêtrés parmi le verre et le bois brisé. Les tentures arrachées par des ongles désespérés pendouillent le long des murs. L’odeur du sang surpasse tout, les mares qui se forment prennent possession des lieux. Même les murs sont décorés d’horribles motifs pourpres… Les mêmes qui maculent le corps des victimes et des bourreaux. Mes mains en sont dégoulinantes…
Des râles se font entendre ici et là, pendant que des gardes ricanant achèvent les blessés. Je réprime à grand peine l’envie de dégobiller toutes mes tripes.
Je… DACEY MORMONT ! Nooon ! Combien de temps s’est écoulé ? Je fonce, la prends dans mes bras. Elle est morte ! Le teint verdâtre, elle ne respire plus !
« Volken… »
La voix d’Illirya , je l’ai entendue ! Illirya ! Mais oui bien sûr, je suis bête, c’est l’illusion que je lui ai demandé, Dacey n’a que l’apparence de la mort ! Je la saisis et entreprends de fuir, avec mes deux gardes. Walder le Noir m’arrête, vérifie le pouls de l’Ourse, puis se désintéresse de la situation quand il constate sa mort. Le plan fonctionne !
En compagnie de mes acolytes, nous esquivons les combats qui se propagent désormais dans le camp des Stark et rejoignons le plus vite possible le bosquet caché repéré il y a un mois.
Nous enlevons les vêtements de Dacey, tentons de laver sa plaie. Celle-ci est abominable, elle a perdu beaucoup trop de sang, et les chairs ravagées ne cachent même plus l’intestin…
Le tonnerre gronde, et l’orage qui couvait depuis quelque temps se déchaîne au-dessus de nos têtes.
Nous nous regardons tous les trois, paniqués. Qui peut gérer les premiers soins ? Les deux boulets haussent les épaules.
« Je peux tenter le coup, Messire, j’ai déjà retiré un carreau d’un collègue après la bataille d’Ash Harbour.
— Ah, ben qu’est-ce que tu attends alors ?
— Ben il en est mort… mais je peux le faire si vous voulez. »
Je n’ai pas le choix, je dois le faire moi-même. Délicatement, je saisis le carreau et je l’extrais tant bien que mal, déchirant un peu plus le pourtour de la plaie. Le sang gicle à gros bouillons. Je plaque mes mains en désespoir de cause, et j’ordonne qu’on applique un cataplasme enduit d’un autre produit de l’herboriste de Blazetower, curatif celui-ci.
L’illusion d’Illirya se dissipe et Dacey apparait telle qu’elle est vraiment. C’est à peine mieux. Elle est livide, tremblante, la peau froide, glaciale. Elle papillonne des yeux, semble prendre conscience, m’agrippe le bras.
— Volken B… Blacksword ? AArgh… »
La douleur la tétanise. Je l’enjoins de se calmer, qu’on tente de la sauver, pas de la tuer, pour la ramener auprès de sa sœur.
Elle fixe sa blessure puis tourne péniblement la tête vers moi. Même si elle est bien moins gracieuse, même si ses traits sont plus grossiers, j’ai quand même l’impression que c’est Lyanna elle-même qui me fixe, qui m’accuse en silence.
« Ma sœur… Lyanna… bien sûr (elle tousse horriblement). Je… son message… vie ou mort… quelle idiote je su … »

Ses yeux se figent, son bras retombe mollement, son souffle déjà bien ténu disparait. La plaie que je comprime gargouille et bouillonne, le sang suinte sous mes paumes.
— NNOOOOOOOOOON ! Dacey, n’abandonnez pas, je vais vous sauver, je l’ai juré ! »
Je me mets à faire n’importe quoi, à retourner le cataplasme, aspirer le sang, faire une sorte de massage cardiaque désordonné. J’appuie sur sa poitrine, je frappe, de rage, de douleur, je m’acharne, il faut qu’elle survive, il le faut ! Je ne sens plus la pluie, ne vois plus les éclairs.
— Seigneur Volken, arrêtez ! C’est terminé… laissez-la reposer en paix. »
Je finis par entendre, au bout de la dixième fois peut-être. Je lui ferme les yeux. L’averse, au moins, nettoie le sang qui se dilue lentement dans les fourrés. Une fissure est apparue en moi… une fracture, une faille… Mes os sont intacts, mais j’ai l’impression de me briser en mille morceaux.
Mécaniquement, j’ordonne la création d’un brancard et le transport de Dacey jusqu’à Salvemer où je les rejoindrai le lendemain. Je dois revenir aux Jumeaux pour ne pas donner l’impression que nous fuyons.
Sur place, le spectacle est à peine plus soutenable que tout à l’heure. Walder le Noir parade avec le corps de Robb sur lequel ils ont cousu la tête de son loup-garou.
Les conspirateurs se congratulent. Frey, Bolton et… Lannister dont un émissaire arbore le lion doré sur son surcot. Si le maitre de Castral Roc n’a plus d’urgence à gérer, plus de guerre à mener, il va peut-être tourner son attention sur Deathwatch et la mort du Lion ecarlate. J’en informerai mon cousin.
Je marmonne quelques banalités polies auprès de mon grand père qui a déjà presque oublié mon existence. Avant de partir, je ne peux m’empêcher de provoquer Roose Bolton.
— Vous triomphez ici, Ser, mais laissez moi vous apporter d’autres nouvelles. Roger Ryswell a été reconnu coupable du meurtre de lady Astreya, sa nièce. Les dieux ont confirmé le verdict en soutenant le bras d’Edrick contre Rickard. Justice a été rendue mais il est possible que nous n’ayons pas appréhendé tous les commanditaires. S’il en reste quelque part sur Westeros, ils seront châtiés, l’Immortel y veillera. »
Il me fixe quelques instants de son regard gris pâle, un peu malsain.
— Si votre cousin a pu vaincre Rickard, c’est que les dieux étaient vraiment favorables à sa cause. Pour le reste… faites ce que vous avez à faire. Comme chacun ici. »
Je ne pousse pas plus loin cet échange de menaces feutrées. C’est tellement vain, inutile. L’espoir est mort dans ces contrées.


Dans le baquet d’eau brûlante où je me nettoie avant le départ, je fais le bilan. Il n’est pas bien compliqué. J’ai vengé mon père. Enfin, j’ai participé à une innommable boucherie sous ce prétexte. Cela ne l’a pas ressuscité. Je me suis juste acharné sur un morceau de viande criblé de carreaux qui ne pouvait même pas esquisser le moindre geste pour se défendre. Je n’imaginais pas avoir ce goût de poussière, de cendre dans la bouche… J’avais une soif insatiable et tous ces litres de sang n’ont fait que m’assécher l’esprit…
Et par-dessus tout (je me coule en dessous de l’eau, laissant quelques bulles crever à la surface), j’ai délaissé la seule tâche qui comptait, j’ai échoué, j’ai rompu une promesse solennelle, une de plus. Lady Lyanna avait placé tous ses espoirs en moi, et je vais lui ramener le cadavre de sa sœur. J’aurais pu la sauver, j’aurais pu… il fallait juste me détourner de mes pulsions morbides. J’ai définitivement brisé les liens avec la lumière de ma vie, elle ne pourra jamais pardonner ce reniement, cette trahison. J’ai délaissé la vie, vendu mon âme à la Mort pour quelques piécettes…
Ce sont ces mêmes pensées qui tournent en boucle tandis que je rejoins les autres à Salvemer et que nous prenons la mer pour rentrer… Je ne vois qu’un moyen pour racheter mes pêchés, et il me fait de moins en moins peur à mesure que les flots nous emportent…

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : jeu. avr. 03, 2014 7:40 am
par pelon
très beau CR

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : ven. avr. 04, 2014 12:25 am
par le Zakhan Noir
yep merci il m' a donné du fil à retordre celui-là. Et ce qui y est relaté a eu des conséquences sur notre séance d'hier...

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : ven. avr. 04, 2014 7:10 am
par pelon
j'imagine bien,
parjure! :mrgreen:

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : ven. avr. 04, 2014 11:18 am
par lolthefol
Pavé inside.
Pavé ketchup d'ailleurs. ;)
Comme d'hab j'ai aimé, mais il faut pas vouloir lire ça en 2 minutes.

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : ven. avr. 04, 2014 11:22 am
par le Zakhan Noir
Pavé ketchup... hi hi bien vu c'est exactement ça. Et oui bon conseil... attendez d'avoir le temps pour le lire! (sachant que le suivant arrivera un de ces 4, écrit par le meujeu ou lady Lyanna, pas sûr d'avoir tout compris)

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : ven. avr. 04, 2014 9:21 pm
par Taho
le Zakhan Noir a écrit :(écrit par le meujeu ou lady Lyanna, pas sûr d'avoir tout compris)
Par Lady Lyanna, avec ajouts du MJ en extra si besoin !

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : sam. avr. 05, 2014 1:34 am
par le Zakhan Noir
j'en salive d'avance, vu ce qui s'est passé... nyark nyark

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : sam. avr. 05, 2014 1:42 am
par lolthefol
ça promet :bierre:

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : dim. avr. 06, 2014 10:24 am
par Tetishery
Et voici le compte-rendu de la dernière séance. Attention, cependant, à ceux qui n'auraient pas encore vu la fin de la saison 3 (tome 3 anglais ou tome 8 français) : quelques éléments évoqués dans ce CR y font référence, et il y a donc risque élevé de spoilers ! Ce sera d'ailleurs sans doute le cas aussi pour toutes les parties suivantes.

Chapitre 31

Chaque jour qui passe depuis le départ de Volken aux Jumeaux est un supplice de plus. Chaque heure, chaque minute, je dois lutter contre ces angoisses qui me prennent au ventre et occupent tout mon esprit : reviendra-t-il vivant de son entreprise insensée ? Parviendra-t-il à écarter ma sœur et ma mère de sa vengeance funeste ? Un sombre pressentiment m’étreint, et je dois m’absorber corps et âme dans un monceau de tâches futiles pour parvenir à l’oublier.
L’ambiance qui règne au château n’a rien pour égayer mes pensées : Edrick passe ses matinées à broyer du noir dans sa chambre, ses après-midis à s’épuiser aux armes dans la cour et ses soirées à noyer son chagrin dans du mauvais vin. Le mestre s’est fait plus discret encore que d’habitude. Même la Braavienne ne sort plus de sa chambre qu’en de rares occasions et c’est pour nous apparaître la mine défaite, le teint plus pâle que celui d’un cadavre.

Un mois se passe ainsi, entre attente insoutenable, administration du château, gestion des domestiques et entraînement de mes « Oursonnes », la troupe d’élite dont Edrick m’a confié le commandement. Jusqu’au jour où Illirya en personne vient frapper à la porte de mes appartements. Après les politesses d’usage, elle m’expose abruptement le motif de sa visite :
– Lady Lyanna, si vous tenez vraiment à votre sœur, faites en sorte de lui envoyer au plus vite une lettre lui demandant de quitter le front pour venir vous rejoindre. Dites-lui que c’est une question de vie ou de mort.
La surprise m’ôte un instant l’usage de la parole, mais la méfiance refait surface immédiatement :
– Et depuis quand vous préoccupez-vous du bien-être de ma famille ? Pourquoi cet intérêt soudain pour ma sœur ?
– N’allez rien vous imaginer : je ne fais pas ça pour vous, mais pour Volken. Parce qu’il tient à vous, et que je tiens à lui.
Elle me quitte sur ces mots, me laissant plus que perplexe. Dois-je prendre au sérieux la demi-menace qui plane dans son conseil ? Ma sœur est-elle réellement en danger ? Et puis, comment le sait-elle, d’ailleurs ? S’agit-il encore de ces « pouvoirs », ces visions accordées par son Dieu, et dont Volken me rebat les oreilles ? Malheureusement, je n’ai pas vraiment d’autre choix que de la croire, en espérant ne pas tomber dans un piège grossier tendu pour m’évincer ou se venger. Je me précipite donc à la tour du mestre pour envoyer un message à Dacey.

Les semaines suivantes s’écoulent avec d’autant plus de lenteur que mon angoisse a redoublé. Je monte désormais chaque matin à la tour du mestre, guette l’arrivée de la barge dans le port et ne laisse plus passer une seule rumeur sans tenter de la décortiquer, en quête d’un indice sur ce qui se passe plus au sud de nos terres.
Ma grossesse suit son cours, mais j’utilise tout ce qu’il faut de robes amples et d’épaisses fourrures pour la dissimuler. Je me suis promis d’être forte, et cela commence par ne pas donner à voir ce qui pourrait passer pour un état de faiblesse. Je crois d’ailleurs que j’y réussis assez bien.
Enfin, on nous annonce l’arrivée de visiteurs à Deathwatch. Mon cœur bondit, et je me précipite dans la grande salle pour y accueillir Volken… avant de ravaler mon enthousiasme : ce n’est pas le cousin d’Edrick qui revient, mais une délégation d’une petite vingtaine d’hommes portant haut le cerf et le cœur de feu de Stannis Baratheon. Ils sont menés par Andrew Estermont, ancien écuyer et cousin du « roi de Dragonstone », et dans leurs rangs se trouvent quelques visages aux oreilles caractéristiques de la famille Florent.
Ils se montrent assez vagues sur le motif de leur présence, qu’ils nous présentent comme une visite diplomatique, de courtoisie. Cela ne les empêche pas de nous rappeler discrètement que Stannis nous a envoyé une lettre il y a quelques mois de cela, pour réclamer notre allégeance, et que nous n’avons pas daigné y répondre. Je ne sens cependant pas d’animosité particulière dans leurs paroles, et il me semble qu’ils cherchent à faire de nous leurs alliés davantage par la persuasion que par la force. Les voilà donc installés au château durablement.

Deux jours plus tard, on annonce enfin le retour du seigneur Volken à Deathwatch. Je rassemble tout le calme qu’il m’est possible de trouver au fond de moi, puis ordonne à mes domestiques et à ma fidèle Cerrah de me suivre jusqu’au port de la ville, d’où je peux observer la lente remontée de la barge jusqu’à nous. Les entrailles nouées, je vois Volken descendre de l’embarcation. Je ne me rappelle pas l’avoir déjà vu la mine si sombre, pas même le jour où il a appris la mort de son père. Sans un regard pour moi, il fait un signe aux hommes qui l’accompagnent, et ceux-ci entament le déchargement de la barge. À vrai dire, il n’y a pas grand-chose à débarquer : juste un chariot. Juste un cercueil.
Mon cœur s’arrête. Les yeux fixés sur cette macabre apparition, je ne peux réprimer le tremblement qui me saisit soudain. Je sais… Malgré toutes mes espérances, malgré ce que j’aimerais croire encore, je sais. Volken s’est arrêté un instant, et je trouve la force de croasser :
– Vous n’avez rien à me dire ?
Je le vois qui ouvre la bouche, semblant lutter avec lui-même, le regard ancré dans le sol. Puis il se détourne et dirige ses pas vers le château, sans un mot.
– Volken ! Vous ne pouvez pas me laisser là sans rien me dire. Ce silence, c’est pire que tout ! Qui se trouve dans ce cercueil ?
Il pivote lentement vers moi, les yeux toujours baissés, et un murmure à peine audible s’échappe de ses lèvres :
– C’est votre sœur, Lady Dacey Mormont.
Un voile noir obscurcit ma vision. Sonnée, je fixe sans le voir ce chariot maudit qui ne me ramène pas ma sœur, mais seulement son corps. Je sens comme un grand vide qui aspire tout en moi, et je remarque à peine Volken, immobile à quelques pas, silencieux.
Je ne sais pas combien de temps je reste ainsi, debout sur le port, dans un état d’hébétude effrayante. C’est Cerrah qui finit par me sortir de ma torpeur en insistant doucement pour que nous rentrions. Volken a disparu.

Je n’ai pas l’énergie de rejoindre ce château détestable, aussi mon amie m’accompagne-t-elle jusqu’au bois sacré, où je jette toutes mes forces dans de longues prières à la mémoire de ma sœur. Quelques heures plus tard, je me résous à rentrer et à aller affronter la vérité. Cerrah me conduit d’abord à la tour du mestre, où l’on a fait monter son corps, puis nous descendons à la cuisine. Il faut que je sache, j’ai besoin d’apprendre de sa bouche comment cela a pu arriver.
Lorsque j’entre dans la pièce, Volken a déjà commencé le récit de ces deux longs mois aux Jumeaux, sous le regard attentif d’Edrick et de Drake, mais il ne développe pas plus que cela. En quelques phrases, il a résumé le piège tendu par son grand-père au Jeune Loup et à sa suite, le rôle finalement minime qu’il y a pris, et son incapacité à sauver Dacey malgré tous ses efforts. Alors que je le presse de donner davantage de détails – comment ma sœur est-elle morte ? quelles ont été ses tentatives pour la sauver ? comment a-t-il pu laisser faire cela alors qu’il a eu sur place un mois complet pour prévenir ces horreurs ? –, il finit par prendre congé sèchement et me laisser à mes interrogations.
Nous finissons la soirée, Edrick et moi, noyés dans tout l’alcool que nous avons pu trouver.

Je passe ma journée du lendemain à essayer de m’entretenir avec Volken. Ce n’est pas chose aisée, car il évite à tout prix de croiser mon chemin. Je parviens tout de même à obtenir de lui la seule bonne nouvelle de ces derniers jours : ma mère ne se trouvait pas parmi les convives du mariage sanglant des Jumeaux. Apparemment, elle avait quitté Robb Stark pour aller lui chercher des alliés dans les marais qui entourent Salvemer. Je respire un peu mieux. Alors que je m’apprête à envoyer un corbeau à l’île des Ours pour prévenir ma famille, c’est justement une de mes autres sœurs, Alysane, qui déboule au château, visiblement affolée :
– Lyanna, que se passe-t-il ? J’ai reçu un message de Dacey me demandant de me rendre au plus vite auprès de toi. Qu’il y allait de ta vie !
Mon cœur se serre encore davantage. Alors, c’est là toute l’utilité qu’aura eue mon message ? Je m’effondre, en pleurs, dans les bras d’Alysane. Elle est forte, et ne laisse rien paraître de son chagrin lorsque je lui relate les terribles événements. Je l’admire pour cela.

Rapidement, j’annonce à Edrick ma volonté de quitter Deathwatch pour l’île des Ours afin de me rendre aux funérailles de ma sœur. Étonnamment, il me propose de m’accompagner. Il souhaite, dit-il, voir de ses propres yeux la contrée d’où son demi-frère est en partie originaire. Je lui en suis reconnaissante car, après les malheurs qui l’ont frappé et le nombre de proches qu’il a dû lui-même enterrer, cela me touche qu’il trouve encore la force de venir accompagner dans cette épreuve ce qu’il lui reste de famille.
Cependant, il revient vers moi quelques heures plus tard pour m’indiquer qu’il ne pourra pas partir tout de suite, que Volken, à qui il veut confier les rênes du pouvoir en notre absence, lui a demandé un délai de deux ou trois jours supplémentaires. Je songe un instant à quitter Deathwatch sans Edrick pour ne pas attendre davantage, mais le pas qu’il a fait vers moi en cette occasion me convainc d’accepter de différer notre départ.
Dans la journée, j’apprends que maître Merren, le gérant de la maison de commerce, a été victime d’un cambriolage qui a visiblement mal tourné, puisque lui et sa femme y ont trouvé la mort. Décidément, quand le sort s’acharne…

Je profite du temps qu’il me reste avant notre départ pour essayer d’obtenir enfin de Volken le récit complet que je lui réclamais hier, mais c’est peine perdue ! Refusant toujours de croiser mon regard, il se dérobe à mes interrogations, ne veut pas en dire davantage. J’ai beau insister, lui faire part de mon désarroi, de la nécessité absolue pour moi de savoir afin de pouvoir faire mon deuil, rien n’y fait. Confronté à mon obstination, il finit par me promettre de m’en dire plus sous peu. Il me fixera un rendez-vous dès qu’il sera prêt.
Je n’ai pas à ronger mon frein trop longtemps : dès le lendemain, Volken vient me trouver dans mes appartements. Pour pouvoir me faire son récit et m’en apprendre plus, il doit m’emmener dans un endroit où nous sommes susceptibles de courir quelques risques. Il m’enjoint donc de prendre les précautions nécessaires, ce que je m’empresse de faire, endossant ma cotte de mailles et glissant mon épée à ma ceinture. Je ne peux cependant m’empêcher de m’interroger : quelles révélations est-il sur le point de me faire, qu’il ne pourrait me dire en face, là, maintenant ?

Nous quittons subrepticement le château et nous retrouvons à l’endroit même où nous avions passé, des mois plus tôt – ne serait-ce pas même des années ? –, notre première nuit ensemble. La silhouette d’un homme se détache dans l’obscurité, et Volken me le présente aussitôt : il s’agit d’un maître-empoisonneur de Blazetower, apparemment l’un des plus doués de sa catégorie. Cet homme, c’est Volken lui-même qui était allé le chercher chez lui après la mort d’Astréïa, au cas où le duel judiciaire avec les Ryswell n’aurait pas eu lieu : il aurait ainsi servi de preuve providentielle dans l’affaire, en venant témoigner que Roger était bien le commanditaire du meurtre et qu’il lui avait demandé le poison retrouvé plus tard sur sa cousine. Une machination bien évidemment montée de toutes pièces par Volken pour se débarrasser de l’encombrant cousin d’Astréïa.
De plus en plus perplexe, je l’écoute m’exposer tout ceci en me demandant bien quel est le rapport avec la mort de ma sœur. Je trépigne intérieurement, mais j’ai bien garde de n’en rien montrer. Il me semble d’ailleurs que l’empoisonneur n’est pas non plus tout à fait à son aise. Après cette longue présentation, Volken finit par sortir de sa poche un petit champignon, qu’il me présente comme extrêmement vénéneux, capable de provoquer la mort en moins d’une heure. L’incompréhension qui m’habite est à son comble.
Enfin, dans un grand geste théâtral, il ouvre les portes d’une armoire qui se trouve là, et j’y découvre avec horreur mon petit Jeor, bâillonné et ligoté, le teint verdâtre.
Alors que j’esquisse un mouvement pour me précipiter vers lui, Volken s’interpose :
– Ma Lady, c’est ce champignon que nous avons fait ingurgiter à votre fils. Sans antidote, il mourra dans… quoi ? Une dizaine de minutes, c’est cela, mon brave ?
L’empoisonneur acquiesce d’un hochement de tête frénétique. Interdite, je dévisage Volken sans comprendre : comment ? pourquoi ? pourquoi vouloir la mort de mon fils ? pourquoi m’infliger ce nouveau supplice qu’est celui de le voir mourir à petit feu ? Je sens les tentacules de cette angoisse que je ne connais que trop bien se glisser dans mon âme.
– Or, reprend Volken, l’antidote, c’est justement moi qui l’ai. Une simple petite fiole, qui vous permettrait de le sauver.
Il tapote d’un geste suffisant sa chemise, là, juste sous son cœur. Et je n’ai désormais d’yeux que pour cela, ce minuscule espoir qui me rendra la vie de mon fils. Mille pensées me traversent l’esprit, mille pensées qui se bousculent sans que je parvienne à les exprimer.

Saisissant soudain sa lance, celui que je ne considère plus désormais que comme mon tortionnaire se place face à moi :
– Ma Lady, pour récupérer cet antidote, il n’y a qu’un seul moyen, c’est de me vaincre en duel. Alors, seulement, vous pourrez sauver votre fils.
– Mais à quoi rime cette mascarade, Volken ? Avez-vous perdu la tête ? Pourquoi moi ? Pourquoi mon fils ?
La panique fait trembler ma voix, et je ne sais plus très bien où je suis, ce que je fais. Le rictus cruel qui déforme les traits de Volken ne lui ressemble tellement pas…
– Allez, ma Lady, l’heure tourne !
Un seul coup d’œil à Jeor me montre qu’il est au plus mal, qu’il n’y a effectivement pas de temps à perdre, mais je ne peux me résoudre à engager le combat. Mon épée n’a pas quitté son fourreau. Les questions tourbillonnent sous mon crâne. Est-ce la folie qui guide ainsi ce comportement insensé ? Je ne décèle pourtant aucune lueur de démence dans les yeux de Volken, juste une résolution sans faille, terrible. Un sortilège, alors ? Les pouvoirs de la Braavienne sont sans pareil, terrifiants, c’est ce qu’il ne cesse justement de me répéter depuis son retour…
Je reste là, les bras ballants, incapable de murmurer autre chose que :
– Pourquoi ?
– Mais parce que vous n’êtes qu’une faible femme, et qu’il est temps de le prouver ! De montrer au monde que, même pour sauver votre fils, vous serez incapable de me vaincre.

Mon sang ne fait qu’un tour. Un dernier regard à Jeor, et mon épée est dans mes mains. Je m’approche lentement de Volken, qui multiplie encore les railleries, mais ne semble pas vouloir porter le premier coup. J’hésite encore un instant, mais la menace qui pèse sur mon fils finit par me décider. Je ne souhaite pas blesser mon adversaire, seulement récupérer l’antidote. Alors, un mouvement souple, et ma lame s’abat sur son poignet. Sa lance lui saute aussitôt des mains, et je la récupère au vol. Je la rejette aussitôt derrière moi, là où il ne pourra pas la récupérer.
Mais je le vois lorgner une épée posée contre un mur non loin. Non ! Il est hors de question qu’il l’atteigne ! Je manœuvre habilement pour m’interposer, et lui porte un nouveau coup, à la poitrine, cette fois. Je l’ai voulu léger, inoffensif, mais ma lame ne rencontre aucune résistance : il ne porte ni plastron de cuir, ni cotte de mailles… Quelle est cette folie ?
Nous sommes là, tous les deux. Lui, désarmé, acculé par mon épée. Moi, incapable de porter le coup fatal qui sauvera Jeor. Je ne peux croire que l’amitié, l’amour, qu’il m’a un jour porté ait disparu à jamais. Alors, j’abats ma dernière carte :
– Cela ne vous suffit pas d’avoir laissé mourir ma sœur ? Vous voulez également m’enlever mon fils, me tuer, moi… et votre enfant par la même occasion ?
L’incompréhension se peint sur son visage… Chacun son tour ! Mais il se reprend aussitôt :
– Quoi, mon fils ? Ferrego n’est pas là, et il n’a rien à voir dans cette histoire !
– Ce n’est pas de lui que je parle…

Je baisse les yeux, de façon suffisamment éloquente. L’incompréhension laisse place à la stupeur, et Volken tombe à genoux, le souffle court.
– Mon enfant, vous êtes sûre ?
– Eh bien… Même si le doute subsiste, mon cœur me dit que c’est le vôtre.
Il a l’air plus sonné encore que je ne pouvais l’espérer. Aussitôt, je m’élance pour aller lui arracher l’antidote. Mais il n’y rien sous sa chemise. Rien qu’un pauvre morceau de parchemin. Pas de fiole. Pas de remède.
Horrifiée, je fixe Volken dans une supplication muette. Il me saisit alors le poignet et me murmure d’une voix tremblante :
– Il n’y a pas d’antidote, car il n’y a pas de poison… Jamais je n’aurais pu faire cela à votre fils.
L’horreur se mue en un soulagement indicible. Mêlé cependant d’affreux doutes.
– Mais… mais alors, à quoi rime cette mise en scène ?
– Je voulais vous pousser à bout, vous obliger à m’affronter… et à me tuer. Une vie pour une vie : la mienne contre celle de votre sœur, que je n’ai pas réussi à sauver.

Alors, enfin, il se lance dans le récit que j’attends depuis trois jours. Sa voix est mal assurée, les larmes et le poids d’émotions trop intenses menacent de le submerger à chaque instant, et il ne me regarde toujours pas, tandis qu’il me relate tout : son arrivée aux Jumeaux, la présence d’Illirya, son confinement forcé, les Noces pourpres, son acharnement contre le Jeune Loup, la mort de ma sœur, ses tentatives pour la sauver envers et contre tout, son désespoir de ne pas y être parvenu… Il ne m’épargne aucun détail, ce dont je lui suis gré.
– Voilà, conclut-il, je suis désormais à votre merci. J’ai échoué. Vous aviez raison depuis le départ : j’ai préféré la mort à la vie, préféré une vengeance morbide à votre sœur, alors que je vous avais promis… Je sais que vous ne pourrez jamais me pardonner, et moi-même je ne pourrai supporter de vivre une minute de plus dans cette honte qui m’accable. Mourir de votre main est le seul sort qui me semble encore envisageable.
Dans le silence qui s’éternise, il sort le parchemin de sa chemise et reprend :
– Tuez-moi, je vous en supplie, c’est ce qui pourra m’arriver de mieux. N’ayez pas peur, car j’ai écrit ici que ce duel était ma volonté et que vous n’êtes coupable en rien. Ce parchemin, mon testament, vous disculpera.

Je reste interdite, silencieuse, immobile. Se rend-il seulement compte de ce qu’il me demande ? Comment pourrais-je un jour porter la main sur lui ? Peut-être m’en voudra-t-il de la décision que je vais prendre, car elle l’obligera à vivre à jamais dans cette honte qui l’étouffe depuis son retour des Jumeaux. Peut-être préfère-t-il effectivement la mort ? Mais je ne puis m’y résoudre.
Le fracas de mon épée qui tombe au sol retentit dans le silence pesant.
– Vous êtes pardonné, Volken. Comment avez-vous pu oser croire que je préférerais vous voir mourir que de vous accorder mon absolution ? Si ce que vous me dites est vrai, vous n’avez pas trahi votre promesse. Vous avez fait tout ce qui était en votre pouvoir pour la sauver, et, pour cela, je vous suis reconnaissante.
Un nouveau silence.
– Mais plus jamais… Vous m’entendez ? Plus jamais, vous ne me referez vivre une scène pareille ! Avez-vous idée de la façon dont vous venez de maltraiter mes émotions ? Et que ce soit bien clair : j’ai besoin de vous à mes côtés. Nous avons tous besoin de vous. Notre famille, Edrick, moi, vos enfants… Illirya. Vous devez être là pour nous tous.

Volken ne semble pas en revenir d’être toujours en vie. Dans quel état de désespoir devait-il bien être pour en arriver à une telle folie ? Le laissant reprendre ses esprits, je vais délivrer Jeor et lui ôter le cataplasme grossier qui avait été appliqué sur son visage pour faire croire à son empoisonnement. Mon tout petit est complètement groggy, et je prie avec ferveur pour qu’aucun souvenir de cette abominable scène ne lui revienne. J’ai encore peine à croire que Volken ait osé en arriver à de telles extrémités avec un enfant, avec mon enfant, pour les bienfaits de son expiation !
L’empoisonneur est, quant à lui, resté silencieux pendant tout cet échange, et ses yeux emplis de terreur me laissent à penser qu’il n’est pour rien dans cela, qu’on lui a forcé la main sous je ne sais quel prétexte. Volken, enfin, semble sortir de sa torpeur, et propose de me faire raccompagner au château sous bonne garde, mais j’insiste pour qu’il se charge lui-même de la tâche : il me doit bien cela. Avant de me quitter, il souhaite toutefois me remettre son testament, en « souvenir de cette soirée », mais je refuse fermement. De toutes les nuits passées avec lui, c’est bien la dernière dont je veuille me rappeler !

Après un repos peuplé de cauchemars, je suis enfin prête à prendre la mer pour rejoindre l’île aux Ours. M’éloigner de Deathwatch, et de Volken, pour quelques jours ne pourra me faire que du bien. Alysane a déjà quitté le port à bord de son navire. Jeor et moi n’attendons plus qu’Edrick pour lever l’ancre. Il paraît enfin sur le pont de L’Immortel, le pas léger et la mine réjouie. Le voir sourire pour la première fois depuis la mort d’Astréïa me met du baume au cœur. Et j’ai comme l’impression que la jeune Selene Florent, avec qui on l’a vu souvent se promener alentour, n’y est pas pour rien.
Nous faisons une courte escale à Blazetower pour proposer à Andre Ryswell de se joindre à nous, nos familles étant malgré tout très liées, et le nouveau seigneur des lieux nous accorde volontiers cette grâce. Malgré le deuil qui marque mon retour dans ma patrie, rien ne peut m’ôter la joie que j’ai à revoir ces paysages et ces visages familiers qui ont peuplé mon enfance, près de trois ans après que je les ai quittés. Les funérailles sont sobres, à l’image de notre famille, mais pas moins émouvantes.

Mes peines sont encore adoucies, le lendemain, par le retour de ma mère sur l’île, Maege Mormont, digne héritière des ours, au caractère aussi trempé que l’acier de son armure. Les bras et les conseils maternels achèvent de me remettre sur pied, et je lui promets d’être forte, de veiller sur mes enfants, comme elle-même a veillé sur nous.
De son côté, elle ne tarde pas à annoncer à ses bannerets et à ses gens que les Mormont n’ont désormais plus de roi, qu’ils décideront seuls de leur avenir, et qu’elle a en conséquence choisi d’abandonner cette guerre futile qui ne mène qu’à davantage de malheurs. Que les soldats retournent à leurs tâches et à leurs familles, ils vivront à présent loin de ces tourments, bien à l’abri sur notre île.
Edrick profite des jours qu’il nous reste pour aller entreprendre quelques marchands et faire je ne sais trop quoi d’autre en ville. Pour ma part, j’essaie surtout de nouer des liens avec Andre, gardant toujours en tête qu’il est, à mes yeux du moins, toujours suspect. Je m’enquiers de ses volontés pour la politique de son domaine : ne songe-t-il pas à se marier pour affermir sa position ? Ne faudrait-il d’ailleurs pas que ce mariage se fasse avec un de ses voisins, surtout maintenant qu’Edrick ne lui est plus « officiellement » lié ?
Mais, tout ce que j’en obtiens, c’est un éclat de rire. L’Aigle me fait très vite comprendre qu’il n’a que faire de la politique, qu’il n’envisage absolument pas de se marier pour l’instant, que nous autres, Blacksword, serons à jamais sa seconde famille, et qu’il considère Edrick comme son frère. Que ce soit vrai ou qu’il cherche seulement à me rassurer, voilà la grande inconnue dans ce discours !

L’heure arrive bientôt où il nous faut repartir, et je quitte à grand peine mon île. À notre arrivée à Deathwatch, nous constatons que les Florent et Estermont ont bien tenu leur parole d’attendre le retour d’Edrick avant de repartir. J’ai même l’impression qu’ils comptent bien rester encore un bout de temps.
Les choses ont repris leur cours, c’est la sempiternelle séance de doléances qui me rassure sur ce point. En effet, notre cher vieux Kevan vient une nouvelle fois nous faire part des interrogations des paysans : la rumeur de la mort de Robb Stark a enfin atteint nos lointaines contrées, et notre bon peuple se demande donc de quel suzerain nous sommes désormais les vassaux.
Nous répliquons fermement que, de toute façon, depuis la mort de Jorren et le retour d’Edrick Sr, nous n’avions plus de maître et étions libres de nos choix. Mais cela ne semble pas tellement plaire à Andrew Estermont, qui en profite pour nous rappeler que nous devrions placer notre confiance en Stannis Baratheon. « Après tout, n’est-il pas le roi des Sept Couronnes et l’élu de R'hllor ? » Encore ce dieu fumeux venu de l’étranger et qu’adore Illirya ! Décidément, cela devient une manie ! Il mentionne encore un nom étrange, aux consonances exotiques… Quelque chose comme « Azoraï » ? C’est ce que je crois comprendre, en tout cas.

Aussitôt, Kevan est sur le qui-vive. Il demande des explications sur tous ces mots bizarres (explications que je serais aussi grandement reconnaissante d’obtenir !), mais Edrick met un terme à la séance, en congédiant le fermier et en expliquant à Estermont qu’il n’aura pas ce genre de discussion en présence de son peuple. Qu’il est d’ailleurs hors de question que nous fassions allégeance à Stannis par les temps qui courent, que nous avons d’abord besoin de temps pour nous remettre des malheurs qui ont frappé notre famille… Bref, qu’il lui faudra attendre encore un peu avant d’obtenir une réponse de sa part.
Estermont assure toutefois Edrick qu’il n’est pas venu ici poser un ultimatum, qu’il nous laisse, bien sûr, tout le temps dont nous avons besoin pour prendre une décision, etc. Mmmmm… Moi, je sens bien que la petite délégation de Stannis ne quittera pas les lieux avant d’avoir gagné à leur cause une nouveau banneret.

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : dim. avr. 06, 2014 11:03 am
par pelon
la scène entre volken et lyanna devait être intense

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : lun. avr. 07, 2014 12:30 am
par le Zakhan Noir
je confirme...

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : lun. avr. 07, 2014 2:25 pm
par lolthefol
Mince je suis entrain de réaliser que ça va devenir compliquer de suivre votre CR, si vous continuez à avancer dans l'histoire. :(

Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]

Publié : lun. avr. 07, 2014 3:49 pm
par le Zakhan Noir
ah oui, on va pas tarder à dépasser la série TV là

Si tu n'as pas lu les bouquins, j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle.

La mauvaise, c'est que tu ne pourras plus suivre les CV sans subir d'abominables spoilers.

La bonne, c'est que tu peux ... lire les bouquins et te délecter! Parce que si tu aimes nos CR qui sont un peu l'imitation made in Taiwan du beaujolais, tu vas forcément adorer le grand crû bourguignon du père G.R.R Martin!