Re: [CR] [Trône de fer - Chroniques de Barrowlands]
Publié : lun. mai 19, 2014 6:10 pm
Bon, c'est l'heure d'avoir un p'tit CR, quand même.
Lors du chapitre 32, il ne s'est pas passé grand chose, donc en attendant d'en avoir (peut-être) un vrai, voici en gros les événements :
De l'initiative d'Edrick Blacksword, les nobles du Nord sont contactés afin de réunir un conseil de guerre et décider de la politique à venir. la mort du roi du Nord et la nomination de Roose Bolton au titre de Gardien du Nord remet beaucoup de choses en question, sans oublier la volonté de Stannis de regrouper le plus de bannerets possibles à sa cause. La présence Fer-né à Moat Cailin et à Torrhen's Square fait également parti des problèmes à traiter le plus vite possible. Les bannerets d'Edrick répondent présent, ainsi qu'un émissaire des clans, Brandon Carrow de l'île des Ours, Andre Ryswell, et le jeune Marck Flint de Flint's Finger, accompagné de sa soeur Tanny, âgée de dix ans.
Pendant que les préparatifs sont faits pour le conseil de guerre, Volken et Illirya apprennent que Ferrego, parfois accompagné de Jeor, a échappé à la vigilance de sa nourrice pour aller jouer dans le Bois Sacré, qui semble être devenu son terrain de jeu privilégier. En effet, comme il l'explique à ses parents, le jeune Ferrego dit "Parler aux arbres" qui sont ses "amis". Illirya voit ça d'un très mauvais œil. Elle congédie la nourrice et en recrute une autre, avec interdiction de laisser l'enfant hors de sa vue. De son côté, Lyanna est très amusée par cet épisode, mais change de ton lorsque Ferrego lui dit savoir qu'elle attend "des bébés". Elle et Volken le grondent pour ne pas qu'il répète cela, ce qui a pour conséquence de complètement bloquer l'enfant à ce sujet, car il n'a pas compris ce qu'il avait fait de mal...
***
Chapitre 33
Baldwin Brand
Le conseil de guerre approchait, et je me trouvais, comme toujours à l’aube d’une nouvelle campagne, empli d’une certaine excitation mêlée à un élan de liberté. Il n’y avait bien que sur le champ de bataille que je me sentais réellement moi-même. Mon père m’avait toujours dit que je serais un soldat. Que j’ai voulu ou non accomplir sa prophétie avait désormais peu d’importance.
Mes frères d’arme, les trois fils Greycloak, Kender Harsnow, et bien sûr Alec, mon frère de sang, étaient tous là, fidèles à l’appel de notre jeune seigneur Edrick, l’Immortel. Le jeune Marck Flint était présent également, envoyé par son frère Jared, maintenant maître de Flint’s Finger depuis le décès de leur père Dayniel aux Jumeaux, lors des noces pourpres du roi Robb Stark. Il était accompagné de sa sœur Tanny, âgée d’une dizaine d’années. J’avais vu ce jeune garçon de quinze ans croiser le fer dans la cour le matin même, et force m’avait été de reconnaître qu’il avait ce petit quelque chose en plus qui fait les grands bretteurs. Comme Joren Blacksword, après lequel son frère avait toujours couru pour ne pas se retrouver évincé. Quelle paire que ces deux là sur un champ de bataille ! Nous ne reverrions plus leur égal, mais le jeune seigneur Edrick et son cousin Volken allaient faire de leur mieux pour être fidèles à cet héritage. Quoiqu’entre eux tous, c’est peut-être entre les mains de Lady Lyanna que la Noire-épée aurait chanté la plus sanglante des mélodies.
Nous étions rejoins pour le repas de midi, avant le conseil de guerre, par l’Aigle, que j’avais toujours du mal à considérer comme Lord Andre Ryswell. Un bâtard ne devrait jamais être appelé à régner. Le seigneur Edrick lui montrait pourtant de l’affection, et je me devais de faire bonne figure à ses côtés, pour ne pas déshonorer la bannière des Blacksword qui flottait au-dessus de ma tête. Un homme des clans et ancien ami d’enfance d’Edrick était également venu pour représenter les siens, et lui et Harsnow formaient un bout de table bruyant et indiscipliné, ripaillant plus que de raison. Brandon Carrow, le capitaine de l’île des Ours, était assis aux côtés de Lady Lyanna, tous deux dans l’ombre de Cerrah Lannister, qui prenait son rôle de garde auprès de la dame avec autant de sérieux que j’accordais à ma propre place de porte bannière. Bien entendu, mestre Drake était lui aussi présent, sans oublier l’envoutante concubine braavosi du seigneur Volken, Illirya.
Le dernier venu à la tablée n’était autre que Lord Andrew Estermont de Greenstone. Ces adorateurs du dieu rouge empoisonnaient l’air de notre cité depuis dix jours déjà, murmurant aux oreilles de notre seigneur les versets maudits de leur culte impie. J’espérais seulement en mon for intérieur qu’Edrick avait la force de ne pas écouter leurs propos outrageux. Non pas que combattre aux côtés de Stannis m’aurait paru déshonorable, mais sous la bannière du dieu rouge, c’était une toute autre histoire.
Le repas avait bien commencé : entraînés par les gloussements de Kender Harsnow et de Kreyn, l’homme des clans, nous partagions bientôt nos récits de batailles et de conquêtes. On pouvait compter sur Estermont pour verser de l’eau froide sur tout ça.
« Alors comme ça, vous préparez un conseil de guerre pour cet après-midi. »
Ce n’était pas une question, Estermont savait pertinemment de quoi il en retournait. Le seigneur Edrick n’y alla pas par quatre chemins.
« Oui, Lord Estermont, un conseil de guerre qui concerne notre région et auquel j’ai convié tous les seigneurs voisins.
— Serait-il possible d’y assister ?
— Excusez-moi, fit Harsnow en se raclant la gorge. Mais vous êtes qui, vous ? »
Les regards se tournèrent vers Andrew Estermont qui ne se démonta pas un instant.
« Je suis Lord Andrew Estermont de Greenstone. Je sers sa majesté Stannis Baratheon, premier du nom, Roi des Andals, de Rhoynar et des Premiers Hommes, Seigneur des Sept Couronnes, béni par la lumière de R’hllor. »
Il me prit, devant le sérieux de ce petit homme, une furieuse envie de rire aux éclats, que je parvenais fort heureusement à contrôler. Je tenais donc ma langue, contrairement à certains de mes camarades assemblés là.
« C’est lequel, déjà, Stannis ? s’amusa l’aîné Greycloak. Il y a tellement de rois en ce moment, je m’y perds. »
Les regards autour de la table se firent soudain plus hostiles. Tant mon frère que Harsnow, Flint et les Greycloak semblaient ne pas apprécier la nouvelle.
« Sa majesté Stannis est le véritable roi des Sept Couronnes. Non seulement est-il l’élu de R’hllor, Azor Ahai, celui qui porte son épée enflammée contre les ténèbres, il est aussi celui que Eddard Stark a soutenu après la mort de Robert Baratheon, au cas où vous auriez oublié.
— Ned Stark est mort, commenta Harsnow. Qui soutient Stannis désormais ?
— Il suffit, » intervint Edrick Blacksword. La discussion était close.
À la fin du repas, alors que tous se levaient pour se rendre à la salle du conseil, j’entendis Estermont demander à mon seigneur :
« Serait-il possible que je me joigne à vous pour ce conseil ? Peut-être pourriez vous profiter d’un regard extérieur sur la politique du Nord.
— J’ai bien peur que ce ne soit pas possible, Lord Estermont. Il s’agit d’un conseil du Nord. Les autres seigneurs ainsi que mes bannerets prendraient sans doute ombrage à la présence d’un étranger venu du Sud qui s’immiscerait dans leur politique.
— Soit, accepta Estermont. Dans ce cas, je vais profiter de l’après-midi pour me promener dans la cité. »
Il s’esquiva immédiatement. Lorsque je rejoignais les autres, je ne trouvais plus trace d’Illirya. Peut-être s’en était-elle retournée auprès de son fils Ferrego ?
Devant la salle du conseil, je retrouvais Stillgar, avec un tas de parchemins sous le bras, prêt pour assurer son rang de général lors du conseil. Un autre homme nous attendait, massif, hirsute, aux cheveux gris acier, la manche gauche de son surcot épinglée sur son moignon, stigmates de la guerre contre les Greyjoy il y a dix ans : Lord Harwood Stout, banneret des Dustin. Sa présence en ville était une simple coïncidence, son petit fils venait de naître, fils de feu Lord Kragnar Ironwolf, et il avait accepté de venir représenter les Dustin.
Je fis entrer tout le monde et les regardais s’égayer, formant des petits groupes par affinité. J’allais moi-même me tenir à la droite de mon seigneur, devant la carte du Nord déroulée au centre de la pièce.
« L’ordre du jour est simple, commença le seigneur Edrick.
— Euh… Il est où, le pinard, Edrick ? l’interrompit Kreyn, appuyé par Harsnow qui plongeait le nez dans tous les récipients disséminés dans la pièce avec une moue déconfite.
— J’ai décidé qu’aucune boisson alcoolisée ne serait servie durant le conseil. Les rafraichissements viendront après. Gardons la tête claire pour débattre. »
J’entendis du coin de l’oreille les deux larrons murmurer des « si j’avais su », mais personne ne les écoutait.
« Je disais donc, à l’ordre du jour, nous avons les points suivants. Premièrement, la libération de Torrhen’s Square. Ensuite, nous devrons aborder la question de l’allégeance des cités du Nord. Nous commençons donc par la situation chez les Tallhart. Nous avons appris qu’un groupe de Fer-nés s’était emparé de la cité. Nous ne savons pas si des membres de la famille régnante demeurent en vie, et nous ignorons également à quel nombre s’élèvent les troupes ennemis.
— En gros, on irait à l’aveugle, quoi, commenta Harsnow, les bras croisés, adossé au mur dans un coin de la pièce.
— Du coup, on serait obligé d’envoyer beaucoup de monde pour pas se casser les dents, indiqua Andre Ryswell, pointant du doigt la situation de Torrhen’s Square sur la carte. La cité est bien placée, avec le lac au sud et les falaises partout sur les côtés, il faudrait attaquer par le Nord, ça veut dire complètement contourner à découvert.
— S’ils sont nombreux, avec de bons archers, ce sera un massacre, ajouta l’aîné Greycloak.
— Je sais pas s’ils ont de bons archers, fit Harsnow, mais en tout cas, ils ont dû récupérer du bon matériel. Le forgeron de Torrhen’s Square était un maître. S’ils ont fait main basse sur son stock, on est mal. »
Les débats se prolongèrent longuement, sur les tactiques d’approche et les potentiels dangers que l’on pourrait éviter. On évoqua la possibilité de naviguer, grâce aux galères fer-nées, le long de la Red River qui remonte de Blazetower jusqu’à lake Torrhen, et malgré les doutes d’Andre Sn… Ryswell (décidemment, ça ne rentrera jamais) sur la possibilité de remonter toute la rivière, souvent très peu profonde, nous nous mîmes d’accord que cela nous permettrait de gagner beaucoup de temps sur l’offensive. Les clans furent également mis à contribution, et Kreyn proposa d’emblée une centaine de ses éclaireurs pour surveiller la cité depuis le Nord.
Lors de ces discussions, je fus immédiatement frappé par l’harmonie entre les trois membres de la famille Blacksword ici présents. Tous parlaient d’une seule voix, dans le même but, et dès que les débats s’enlisaient, ou que les participants s’égaraient dans des tergiversations diverses, le seigneur Edrick était là pour ramener tout le monde à l’ordre du jour avec une autorité que je n’avais jusqu’alors jamais vue en lui. Un simple mot suffisait à faire revenir le calme dans la pièce, et nous pûmes ainsi statuer sur l’offensive et la logistique.
« Stillgar, pouvez-vous nous donner les chiffres de nos troupes prêtes au combat ?
— Bien sûr, seigneur. Nous avons quatre cents hommes formés, auxquels s’ajoutent les cinq cents vétérans revenus avec votre père du front. Deux cents nouvelles recrues sont également en cours de formation.
— Eh beh, tu t’es fait plaisir sur l’armée, Edrick, commenta l’Aigle. Moi j’en ai pas autant, six cent fantassins et une centaine de cavaliers.
— Lord Flint ?
— Nous avons beaucoup souffert de l’arrivée des Fer-nés, et les troupes de mon père ne sont pas revenues depuis les noces pourpres. Nous avons en tout et pour tout une centaine d’hommes, dont une grande partie encore en formation.
— Brandon Carrow ?
— La force principale de l’île des Ours ne s’engagera pas pleinement dans le conflit, j’en ai bien peur. Mais je pourrais moi-même mener cinquante lames à l’assaut. Je saurai convaincre Lady Maege.
— Bien, conclut Edrick. Deathwatch enverra donc ses cinq cent vétérans pour libérer Torrhen’s square.
— J’y ajouterai trois cent de mes fantassins, et je les mènerai moi-même, ajouta l’Aigle.
— Bien que nos troupes soient réduites, dit Marck Flint, je peux m’engager personnellement à combattre au nom des Flint avec une vingtaine d’hommes.
— Cela fait près de mille hommes au total, en incluant les éclaireurs des clans.
— Excusez-moi, seigneur Edrick, intervint Harsnow, mais si vous envoyez tous mes vétérans à Torrhen’s Square, ils ne me restera personne pour défendre mon village. Dois-je vous rappeler que mes gens sont les plus proches de Moat Cailin, et que c’est là-bas que le gros des Fer-nés se trouve encore. Nous avons besoin de troupes pour nous protéger des raids.
— Nous nous arrangerons, Lord Harsnow. Qui se prononce pour cette offensive ? »
Tous levèrent la main, sauf Harsnow et les frères Greycloak, qui s’interrogeaient du regard.
« Qui est contre ?
— En l’état, dit Harsnow, je dois m’y opposer tant que je ne suis pas certain de garder des hommes pour protéger mon village.
— Qui s’abstient ?
— Ben nous, fait Arnel Greycloak. Il faudrait qu’on consulte notre père avant de nous prononcer.
— La majorité est atteinte. Nous lancerons donc l’assaut dès que possible. Nous nous rassemblerons à Blazetower dans un mois, et retrouverons nos frères des clans quinze jours plus tard aux abords de Torrhen’s Square. »
Tous acquiescèrent, certains applaudirent. L’Aigle était penché sur la carte, voyant déjà se profiler la bataille à venir. Je dois avouer que j’étais moi-même en face de lui à faire de même, et nous échangeâmes un regard entendu, presque complice, de soldat à soldat.
« Deuxième point à l’ordre du jour, l’allégeance des seigneurs du Nord. »
Le débat qui suivi fut animé. Les allégations de suzeraineté du seigneur Stannis faites par Estermont refirent surface, immédiatement comparées à la haine inspirée par Roose Bolton et sa traîtrise au profit des Lannister. Seul Lord Harwood Stout, qui s’était tu pendant toute la durée du conseil, intervint en faveur de Lord Bolton.
« Je suis le vassal de Lady Dustin, et Lady Dustin a juré allégeance à Roose Bolton, nommé gardien du Nord par sa majesté Joffrey Baratheon. Mon allégeance va donc à Lord Bolton. »
Mais personne ne voulut l’entendre.
« Mais si vous ne voulez pas plier le genoux devant Bolton, plierez-vous le genoux devant Stannis ? » demanda Flint.
Tous répondirent « Non » comme un seul homme.
« Il semblerait que le Nord souhaite demeurer indépendant pour l’instant, conclut Edrick. Il faudrait savoir ce que les Manderly de White Harbour ont à en dire, mais pour l’instant, je pense que nous sommes tous d’accord que plier le genoux n’est pas une priorité. »
Tout le monde abonda dans son sens, et ainsi, le conseil fut ajourné. Je quittai la salle avec tous mes confrères bannerets et les seigneurs Flint et Ryswell. Pendant que tous allaient profiter du buffet et des rafraichissements, j’errai quelques temps dans les couloirs, non loin de la salle du conseil. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je crus voir, quelques instants plus tard, la porte s’ouvrir, comme par elle-même. J’approchai par curiosité, mais ne vit personne autour. Ce n’est qu’à l’arrivée de la dame Illirya, quelques secondes plus tard, que je m’écartai pour la laisser passer.
« Vous savez déjà que le conseil est terminé ? Vous avez des oreilles partout ! »
Elle me répondit d’un sourire qui, je dois l’avouer, me glaça quelque peu le sang.
Après que Volken et mestre Drake se soient retirés également, je les entendis poursuivre une conversation très pressante à propos de commerce, et du trépas si soudain de maître Merren pour lequel l’enquête d’un de mes lieutenants était encore en cours. Peut-être l’ignoraient-ils, mais, jusque là, il avait fait choux blanc. Je les laissais s’éloigner et me retirait moi-même en direction des baraquements pour avoir un dernier rapport de mes sentinelles. En chemin, j’entrevis du coin de l’œil la silhouette de Lady Lyanna dans le Godswood, et à ses côtés, je devinais la présence de Lord Estermont. Un instant je jurai qu’il avait essayé de lui prendre la main, mais ce devait être mes sens qui me jouaient des tours.
Alors que j’approchais la tour Nord, j’entendis des cris de peur et de surprise. J’accourus sur les lieux pour découvrir un homme portant la bannière des Harsnow sur son surcot. Il gisait sur le pavé, les membres brisés, et semblait avoir dégringolé au bas de l’escalier qui menait au chemin de ronde. La chute lui avait rompu le cou. En approchant le corps, je sentis une forte odeur d’alcool : l’homme était visiblement ivre. Il ne me restait plus qu’à rentrer au château pour faire un nouveau rapport…
Lors du chapitre 32, il ne s'est pas passé grand chose, donc en attendant d'en avoir (peut-être) un vrai, voici en gros les événements :
De l'initiative d'Edrick Blacksword, les nobles du Nord sont contactés afin de réunir un conseil de guerre et décider de la politique à venir. la mort du roi du Nord et la nomination de Roose Bolton au titre de Gardien du Nord remet beaucoup de choses en question, sans oublier la volonté de Stannis de regrouper le plus de bannerets possibles à sa cause. La présence Fer-né à Moat Cailin et à Torrhen's Square fait également parti des problèmes à traiter le plus vite possible. Les bannerets d'Edrick répondent présent, ainsi qu'un émissaire des clans, Brandon Carrow de l'île des Ours, Andre Ryswell, et le jeune Marck Flint de Flint's Finger, accompagné de sa soeur Tanny, âgée de dix ans.
Pendant que les préparatifs sont faits pour le conseil de guerre, Volken et Illirya apprennent que Ferrego, parfois accompagné de Jeor, a échappé à la vigilance de sa nourrice pour aller jouer dans le Bois Sacré, qui semble être devenu son terrain de jeu privilégier. En effet, comme il l'explique à ses parents, le jeune Ferrego dit "Parler aux arbres" qui sont ses "amis". Illirya voit ça d'un très mauvais œil. Elle congédie la nourrice et en recrute une autre, avec interdiction de laisser l'enfant hors de sa vue. De son côté, Lyanna est très amusée par cet épisode, mais change de ton lorsque Ferrego lui dit savoir qu'elle attend "des bébés". Elle et Volken le grondent pour ne pas qu'il répète cela, ce qui a pour conséquence de complètement bloquer l'enfant à ce sujet, car il n'a pas compris ce qu'il avait fait de mal...
***
Chapitre 33
Baldwin Brand
Le conseil de guerre approchait, et je me trouvais, comme toujours à l’aube d’une nouvelle campagne, empli d’une certaine excitation mêlée à un élan de liberté. Il n’y avait bien que sur le champ de bataille que je me sentais réellement moi-même. Mon père m’avait toujours dit que je serais un soldat. Que j’ai voulu ou non accomplir sa prophétie avait désormais peu d’importance.
Mes frères d’arme, les trois fils Greycloak, Kender Harsnow, et bien sûr Alec, mon frère de sang, étaient tous là, fidèles à l’appel de notre jeune seigneur Edrick, l’Immortel. Le jeune Marck Flint était présent également, envoyé par son frère Jared, maintenant maître de Flint’s Finger depuis le décès de leur père Dayniel aux Jumeaux, lors des noces pourpres du roi Robb Stark. Il était accompagné de sa sœur Tanny, âgée d’une dizaine d’années. J’avais vu ce jeune garçon de quinze ans croiser le fer dans la cour le matin même, et force m’avait été de reconnaître qu’il avait ce petit quelque chose en plus qui fait les grands bretteurs. Comme Joren Blacksword, après lequel son frère avait toujours couru pour ne pas se retrouver évincé. Quelle paire que ces deux là sur un champ de bataille ! Nous ne reverrions plus leur égal, mais le jeune seigneur Edrick et son cousin Volken allaient faire de leur mieux pour être fidèles à cet héritage. Quoiqu’entre eux tous, c’est peut-être entre les mains de Lady Lyanna que la Noire-épée aurait chanté la plus sanglante des mélodies.
Nous étions rejoins pour le repas de midi, avant le conseil de guerre, par l’Aigle, que j’avais toujours du mal à considérer comme Lord Andre Ryswell. Un bâtard ne devrait jamais être appelé à régner. Le seigneur Edrick lui montrait pourtant de l’affection, et je me devais de faire bonne figure à ses côtés, pour ne pas déshonorer la bannière des Blacksword qui flottait au-dessus de ma tête. Un homme des clans et ancien ami d’enfance d’Edrick était également venu pour représenter les siens, et lui et Harsnow formaient un bout de table bruyant et indiscipliné, ripaillant plus que de raison. Brandon Carrow, le capitaine de l’île des Ours, était assis aux côtés de Lady Lyanna, tous deux dans l’ombre de Cerrah Lannister, qui prenait son rôle de garde auprès de la dame avec autant de sérieux que j’accordais à ma propre place de porte bannière. Bien entendu, mestre Drake était lui aussi présent, sans oublier l’envoutante concubine braavosi du seigneur Volken, Illirya.
Le dernier venu à la tablée n’était autre que Lord Andrew Estermont de Greenstone. Ces adorateurs du dieu rouge empoisonnaient l’air de notre cité depuis dix jours déjà, murmurant aux oreilles de notre seigneur les versets maudits de leur culte impie. J’espérais seulement en mon for intérieur qu’Edrick avait la force de ne pas écouter leurs propos outrageux. Non pas que combattre aux côtés de Stannis m’aurait paru déshonorable, mais sous la bannière du dieu rouge, c’était une toute autre histoire.
Le repas avait bien commencé : entraînés par les gloussements de Kender Harsnow et de Kreyn, l’homme des clans, nous partagions bientôt nos récits de batailles et de conquêtes. On pouvait compter sur Estermont pour verser de l’eau froide sur tout ça.
« Alors comme ça, vous préparez un conseil de guerre pour cet après-midi. »
Ce n’était pas une question, Estermont savait pertinemment de quoi il en retournait. Le seigneur Edrick n’y alla pas par quatre chemins.
« Oui, Lord Estermont, un conseil de guerre qui concerne notre région et auquel j’ai convié tous les seigneurs voisins.
— Serait-il possible d’y assister ?
— Excusez-moi, fit Harsnow en se raclant la gorge. Mais vous êtes qui, vous ? »
Les regards se tournèrent vers Andrew Estermont qui ne se démonta pas un instant.
« Je suis Lord Andrew Estermont de Greenstone. Je sers sa majesté Stannis Baratheon, premier du nom, Roi des Andals, de Rhoynar et des Premiers Hommes, Seigneur des Sept Couronnes, béni par la lumière de R’hllor. »
Il me prit, devant le sérieux de ce petit homme, une furieuse envie de rire aux éclats, que je parvenais fort heureusement à contrôler. Je tenais donc ma langue, contrairement à certains de mes camarades assemblés là.
« C’est lequel, déjà, Stannis ? s’amusa l’aîné Greycloak. Il y a tellement de rois en ce moment, je m’y perds. »
Les regards autour de la table se firent soudain plus hostiles. Tant mon frère que Harsnow, Flint et les Greycloak semblaient ne pas apprécier la nouvelle.
« Sa majesté Stannis est le véritable roi des Sept Couronnes. Non seulement est-il l’élu de R’hllor, Azor Ahai, celui qui porte son épée enflammée contre les ténèbres, il est aussi celui que Eddard Stark a soutenu après la mort de Robert Baratheon, au cas où vous auriez oublié.
— Ned Stark est mort, commenta Harsnow. Qui soutient Stannis désormais ?
— Il suffit, » intervint Edrick Blacksword. La discussion était close.
À la fin du repas, alors que tous se levaient pour se rendre à la salle du conseil, j’entendis Estermont demander à mon seigneur :
« Serait-il possible que je me joigne à vous pour ce conseil ? Peut-être pourriez vous profiter d’un regard extérieur sur la politique du Nord.
— J’ai bien peur que ce ne soit pas possible, Lord Estermont. Il s’agit d’un conseil du Nord. Les autres seigneurs ainsi que mes bannerets prendraient sans doute ombrage à la présence d’un étranger venu du Sud qui s’immiscerait dans leur politique.
— Soit, accepta Estermont. Dans ce cas, je vais profiter de l’après-midi pour me promener dans la cité. »
Il s’esquiva immédiatement. Lorsque je rejoignais les autres, je ne trouvais plus trace d’Illirya. Peut-être s’en était-elle retournée auprès de son fils Ferrego ?
Devant la salle du conseil, je retrouvais Stillgar, avec un tas de parchemins sous le bras, prêt pour assurer son rang de général lors du conseil. Un autre homme nous attendait, massif, hirsute, aux cheveux gris acier, la manche gauche de son surcot épinglée sur son moignon, stigmates de la guerre contre les Greyjoy il y a dix ans : Lord Harwood Stout, banneret des Dustin. Sa présence en ville était une simple coïncidence, son petit fils venait de naître, fils de feu Lord Kragnar Ironwolf, et il avait accepté de venir représenter les Dustin.
Je fis entrer tout le monde et les regardais s’égayer, formant des petits groupes par affinité. J’allais moi-même me tenir à la droite de mon seigneur, devant la carte du Nord déroulée au centre de la pièce.
« L’ordre du jour est simple, commença le seigneur Edrick.
— Euh… Il est où, le pinard, Edrick ? l’interrompit Kreyn, appuyé par Harsnow qui plongeait le nez dans tous les récipients disséminés dans la pièce avec une moue déconfite.
— J’ai décidé qu’aucune boisson alcoolisée ne serait servie durant le conseil. Les rafraichissements viendront après. Gardons la tête claire pour débattre. »
J’entendis du coin de l’oreille les deux larrons murmurer des « si j’avais su », mais personne ne les écoutait.
« Je disais donc, à l’ordre du jour, nous avons les points suivants. Premièrement, la libération de Torrhen’s Square. Ensuite, nous devrons aborder la question de l’allégeance des cités du Nord. Nous commençons donc par la situation chez les Tallhart. Nous avons appris qu’un groupe de Fer-nés s’était emparé de la cité. Nous ne savons pas si des membres de la famille régnante demeurent en vie, et nous ignorons également à quel nombre s’élèvent les troupes ennemis.
— En gros, on irait à l’aveugle, quoi, commenta Harsnow, les bras croisés, adossé au mur dans un coin de la pièce.
— Du coup, on serait obligé d’envoyer beaucoup de monde pour pas se casser les dents, indiqua Andre Ryswell, pointant du doigt la situation de Torrhen’s Square sur la carte. La cité est bien placée, avec le lac au sud et les falaises partout sur les côtés, il faudrait attaquer par le Nord, ça veut dire complètement contourner à découvert.
— S’ils sont nombreux, avec de bons archers, ce sera un massacre, ajouta l’aîné Greycloak.
— Je sais pas s’ils ont de bons archers, fit Harsnow, mais en tout cas, ils ont dû récupérer du bon matériel. Le forgeron de Torrhen’s Square était un maître. S’ils ont fait main basse sur son stock, on est mal. »
Les débats se prolongèrent longuement, sur les tactiques d’approche et les potentiels dangers que l’on pourrait éviter. On évoqua la possibilité de naviguer, grâce aux galères fer-nées, le long de la Red River qui remonte de Blazetower jusqu’à lake Torrhen, et malgré les doutes d’Andre Sn… Ryswell (décidemment, ça ne rentrera jamais) sur la possibilité de remonter toute la rivière, souvent très peu profonde, nous nous mîmes d’accord que cela nous permettrait de gagner beaucoup de temps sur l’offensive. Les clans furent également mis à contribution, et Kreyn proposa d’emblée une centaine de ses éclaireurs pour surveiller la cité depuis le Nord.
Lors de ces discussions, je fus immédiatement frappé par l’harmonie entre les trois membres de la famille Blacksword ici présents. Tous parlaient d’une seule voix, dans le même but, et dès que les débats s’enlisaient, ou que les participants s’égaraient dans des tergiversations diverses, le seigneur Edrick était là pour ramener tout le monde à l’ordre du jour avec une autorité que je n’avais jusqu’alors jamais vue en lui. Un simple mot suffisait à faire revenir le calme dans la pièce, et nous pûmes ainsi statuer sur l’offensive et la logistique.
« Stillgar, pouvez-vous nous donner les chiffres de nos troupes prêtes au combat ?
— Bien sûr, seigneur. Nous avons quatre cents hommes formés, auxquels s’ajoutent les cinq cents vétérans revenus avec votre père du front. Deux cents nouvelles recrues sont également en cours de formation.
— Eh beh, tu t’es fait plaisir sur l’armée, Edrick, commenta l’Aigle. Moi j’en ai pas autant, six cent fantassins et une centaine de cavaliers.
— Lord Flint ?
— Nous avons beaucoup souffert de l’arrivée des Fer-nés, et les troupes de mon père ne sont pas revenues depuis les noces pourpres. Nous avons en tout et pour tout une centaine d’hommes, dont une grande partie encore en formation.
— Brandon Carrow ?
— La force principale de l’île des Ours ne s’engagera pas pleinement dans le conflit, j’en ai bien peur. Mais je pourrais moi-même mener cinquante lames à l’assaut. Je saurai convaincre Lady Maege.
— Bien, conclut Edrick. Deathwatch enverra donc ses cinq cent vétérans pour libérer Torrhen’s square.
— J’y ajouterai trois cent de mes fantassins, et je les mènerai moi-même, ajouta l’Aigle.
— Bien que nos troupes soient réduites, dit Marck Flint, je peux m’engager personnellement à combattre au nom des Flint avec une vingtaine d’hommes.
— Cela fait près de mille hommes au total, en incluant les éclaireurs des clans.
— Excusez-moi, seigneur Edrick, intervint Harsnow, mais si vous envoyez tous mes vétérans à Torrhen’s Square, ils ne me restera personne pour défendre mon village. Dois-je vous rappeler que mes gens sont les plus proches de Moat Cailin, et que c’est là-bas que le gros des Fer-nés se trouve encore. Nous avons besoin de troupes pour nous protéger des raids.
— Nous nous arrangerons, Lord Harsnow. Qui se prononce pour cette offensive ? »
Tous levèrent la main, sauf Harsnow et les frères Greycloak, qui s’interrogeaient du regard.
« Qui est contre ?
— En l’état, dit Harsnow, je dois m’y opposer tant que je ne suis pas certain de garder des hommes pour protéger mon village.
— Qui s’abstient ?
— Ben nous, fait Arnel Greycloak. Il faudrait qu’on consulte notre père avant de nous prononcer.
— La majorité est atteinte. Nous lancerons donc l’assaut dès que possible. Nous nous rassemblerons à Blazetower dans un mois, et retrouverons nos frères des clans quinze jours plus tard aux abords de Torrhen’s Square. »
Tous acquiescèrent, certains applaudirent. L’Aigle était penché sur la carte, voyant déjà se profiler la bataille à venir. Je dois avouer que j’étais moi-même en face de lui à faire de même, et nous échangeâmes un regard entendu, presque complice, de soldat à soldat.
« Deuxième point à l’ordre du jour, l’allégeance des seigneurs du Nord. »
Le débat qui suivi fut animé. Les allégations de suzeraineté du seigneur Stannis faites par Estermont refirent surface, immédiatement comparées à la haine inspirée par Roose Bolton et sa traîtrise au profit des Lannister. Seul Lord Harwood Stout, qui s’était tu pendant toute la durée du conseil, intervint en faveur de Lord Bolton.
« Je suis le vassal de Lady Dustin, et Lady Dustin a juré allégeance à Roose Bolton, nommé gardien du Nord par sa majesté Joffrey Baratheon. Mon allégeance va donc à Lord Bolton. »
Mais personne ne voulut l’entendre.
« Mais si vous ne voulez pas plier le genoux devant Bolton, plierez-vous le genoux devant Stannis ? » demanda Flint.
Tous répondirent « Non » comme un seul homme.
« Il semblerait que le Nord souhaite demeurer indépendant pour l’instant, conclut Edrick. Il faudrait savoir ce que les Manderly de White Harbour ont à en dire, mais pour l’instant, je pense que nous sommes tous d’accord que plier le genoux n’est pas une priorité. »
Tout le monde abonda dans son sens, et ainsi, le conseil fut ajourné. Je quittai la salle avec tous mes confrères bannerets et les seigneurs Flint et Ryswell. Pendant que tous allaient profiter du buffet et des rafraichissements, j’errai quelques temps dans les couloirs, non loin de la salle du conseil. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je crus voir, quelques instants plus tard, la porte s’ouvrir, comme par elle-même. J’approchai par curiosité, mais ne vit personne autour. Ce n’est qu’à l’arrivée de la dame Illirya, quelques secondes plus tard, que je m’écartai pour la laisser passer.
« Vous savez déjà que le conseil est terminé ? Vous avez des oreilles partout ! »
Elle me répondit d’un sourire qui, je dois l’avouer, me glaça quelque peu le sang.
Après que Volken et mestre Drake se soient retirés également, je les entendis poursuivre une conversation très pressante à propos de commerce, et du trépas si soudain de maître Merren pour lequel l’enquête d’un de mes lieutenants était encore en cours. Peut-être l’ignoraient-ils, mais, jusque là, il avait fait choux blanc. Je les laissais s’éloigner et me retirait moi-même en direction des baraquements pour avoir un dernier rapport de mes sentinelles. En chemin, j’entrevis du coin de l’œil la silhouette de Lady Lyanna dans le Godswood, et à ses côtés, je devinais la présence de Lord Estermont. Un instant je jurai qu’il avait essayé de lui prendre la main, mais ce devait être mes sens qui me jouaient des tours.
Alors que j’approchais la tour Nord, j’entendis des cris de peur et de surprise. J’accourus sur les lieux pour découvrir un homme portant la bannière des Harsnow sur son surcot. Il gisait sur le pavé, les membres brisés, et semblait avoir dégringolé au bas de l’escalier qui menait au chemin de ronde. La chute lui avait rompu le cou. En approchant le corps, je sentis une forte odeur d’alcool : l’homme était visiblement ivre. Il ne me restait plus qu’à rentrer au château pour faire un nouveau rapport…