Oui, je l'ai fait jouer
Ardanyan's Revenge, le véritable premier scénario d'introduction pour Earthdawn, que le monde attendait depuis la première édition.
À combien de joueurs ?
Trois, mais les chaises ont tourné. Il y a eu 5 joueurs en tout, deux qui ont tenu du début à la fin, un troisième qui est entré en cours de route mais qui a bien accroché. Deux autres de passage.
Sur combien de temps ? À quel rythme ?
Mine de rien, presque un an, mais à moins de deux séances par mois, et deux mois d'interruption de vacances d'été. Bref, entre quinze et une vingtaine de séances, je dirais.
Avec quel système/édition ?
La troisième édition d'Earthdawn, parce que c'est la seule, la meilleure, la plus épaisse, et que « plus, c'est mieux » (forcément, mais pas toujours, en l'occurrence).
Nous avons essayé de jouer à la lettre, parce que nous découvrions tous le système et nous voulions voir ce qu'il avait dans le ventre.
À quel âge ?
Récemment (2012). Loin de mes folles années de jeunesse et de lycée.
Mes bidouilles
- La première scène de l'aventure se déroule dans une taverne : les PJ trouvent un joyau qui ne leur est pas destiné. Cet événement n'a aucun rapport avec l'intrigue et tombe comme un cheveu sur la soupe. J'ai relié l'histoire du joyau à celle du kaer, parce que c'est un peu déroutant pour les joueurs de commencer sur une enquête qu'il faut rapidement abandonner…
- Dans le scénario initial, je n'ai pas le souvenir d'avoir trouvé une raison qui aurait pu pousser le conseil du kaer à monter une seconde expédition, cinquante ans après l'échec de la première. J'ai donc imaginé qu'on découvrait par hasard que les mesures de mana avaient été faussées pour masquer la fin probable du Châtiment.
- Les souterrains : le scénario ne donne pas vraiment d'information sur les souterrains qui entourent le kaer (The Deeps), et dans lesquelles plusieurs scènes sont censées se dérouler (poursuite de membres du culte de l'homme mort). Mieux vaut se préparer. Pareillement, j'ai imaginé qu'un kaer digne de ce nom avait pu se protéger en bâtissant un faux kaer au-dessus de lui (la "cité silencieuse" de mon CR). En plus, cela contribuait à l'ambiance étrange et inquiétante à ce moment du scénario, d'autant que mes joueurs n'ont vraiment pas compris où ils se trouvaient et le pourquoi de cette mystérieuse citée de pierre.
- Enfin, je me suis dit qu'il fallait impliquer un des maîtres des personnages dans le complot de Leldrin : soit en tant que traître, soit en tant qu'adepte recruté par Leldrin mais désireux de libérer, de son côté, le kaer. La découverte du double ou triple jeu d'un PNJ connu permet de pimenter le scénario, même si je n'ai pas eu l'occasion, en ce qui me concerne, de mettre en scène la confrontation maître/disciple…
Côté système, c'est plus que mitigé, mais ce n'est pas l'endroit pour en parler.
- Scénario pour joueurs débutants, mais pas pour MJ débutant. Il y a bien trop d'éléments supposés connus sur l'univers, et même : à quelques exceptions près, on ne connaît des PNJ que le nom, ce qui est un comble dans un univers bigarré comme celui-là. Quel lecteur est-il raisonnablement capable de savoir que « Brelduin » est un nom féminin nain, et non masculin troll ? Comment un éditeur peut-il laisser passer ce genre de manque ?
- Certaines questions élémentaires, comme « Combien il y a-t-il d'adeptes dans le kaer ? », ne trouvent leur réponse qu'en lisant et relisant le texte (en l'occurrence, celui-ci permet de reconstituer la population totale du kaer et, grâce à la proportion estimée d'adeptes, une information trouvée je ne sais plus où, mais pas dans le scénario, on en déduit qu'il y a environ 60 adeptes dans le kaer, de mémoire).
- En terme d'intrigue, les passions sont un peu au cœur de l'intrigue, mais il n'y a pas un mot sur les questeurs ni sur la façon dont les passions interviennent dans le monde d'Earthdawn. Résultat, mon groupe a totalement ignoré ce point et s'est régulièrement interrogé sur ce qui pouvait motiver quiconque à fomenter un complot pour garder des nains enfermés sous terre.
- Les PNJ sont trop puissants pour être affrontés, à quoi bon donner leurs caractéristiques ? Inversement, il faut définir les maîtres des PJ ; des exemples auraient pu être mis.
- Tout d'abord, les PJ ont beau être de futur héros, il n'y a pas vraiment de piste pour les motiver à sortir et résoudre les différents mystères, si ce n'est que « ce sont des héros » et qu'ils feront très certainement ce qu'on attend d'eux. Mes joueurs ont parfois été un peu déboussolés : après tout, il y a dans le kaer d'autres adeptes, plus puissants et compétents pour s'occuper de ces choses-là.
- Ensuite, toute la partie dans les mines a été rédigée pour la version "PJ venus de l'extérieur". Lorsque votre groupe joue des habitants du kaer, difficile d'imaginer qu'il ne reste aucune trace de la précédente expédition, que les pièges et les effondrements se sont "réembobinés tous seuls". Et le Brithan (streum) qui les attend à la sortie ?
- On peut aussi citer le fait que la cérémonie du sang qui lie les adeptes de la première expédition se déroule dans une auberge plutôt que dans une salle du conseil. En plus, le plan de cette auberge est ridicule. D'accord, il faut expliquer pourquoi et comment les PJ sont amenés à intervenir dans cette cérémonie, mais là, c'est un peu raté.
- Dernier exemple : on nous parle d'épreuves de sélection pour les adeptes, et c'est tout ! Alors que la réaction naturelle des joueurs, c'est de vouloir participer à cette sélection…
Il y a enfin, je pense, un petit "bug" concernant les distances : Leldrin est censé voyager entre la ville et le kaer par un souterrain. Mais la distance entre la mairie de la ville et le kaer semble être de plusieurs kilomètres, ce qui est un peu ridicule (en fait, c'est un de mes joueurs qui a imaginé que la ville se trouvait exactement au-dessus du kaer, car l'agencement de l'une lui évoquait celui de l'autre).
Et on n'échappe pas à quelques clichés méd-fan qui font sursauter les vieux renards : depuis quand fait-on garder une salle des trésors avec deux gardes à qui ont confie les clés du coffre autour du cou ? Et les passages secrets derrière les statues…
En somme, un peu trop de situations ridicules ou tirées par les cheveux. L'aventure est, mine de rien, très linéaire ; ce n'est pas un défaut et, par nature, la résolution d'un mystère l'est, mais le texte manque cruellement d'indications pour remettre les PJ dans le droit chemin si, comme c'est souvent le cas, ils s'écartent de celui-ci.
Inversement, rien pour lier les scènes prévues, parfois séparées de plusieurs jours. Quelques 10-18 auraient étés appréciés.
Je suis trop vieux pour ce décor de carton-pâte. Du tolkien (nains, elfes, trolls et orcs) arrangé, assaisonné d'homme-lézards ou d'hommes-cailloux pour faire exotique et justifier de pouvoirs comme ceci ou comme cela, ça ne marche plus, j'ai juste envie de bâiller.
Mes conseils
- Faire son index récapitulatif des personnages, avec leur race, leur sexe, leur occupation, et la page/endroit où ils sont mentionnés/décrits
- Donner des noms de rues dans le kaer et dans la ville
- Faire ses propres plans au cas où : The Deeps (les mines), ou se référer à la version allemande, dont les plans sont complets !
- Tous les PJ doivent avoir une bonne raison de vouloir quitter le kaer
- Étoffer l'intrigue du questeur assassiné par le culte de l'homme mort
- Étoffer l'intrigue du joyau ?
- Insister sur les Passions et leur rôle, si possible en ajoutant un PNJ questeur qui pourrait servir de mentor ou de référent pour les personnages.
- Motiver les personnages pour qu'ils ne partent pas simplement ?